Divers, Nature

LES ARBRES

Comme bien d’autres éléments de la nature, l’arbre est souvent représenté à l’opéra.

Le plus ancien de cess arbres est certainement l’Yggdrasil, le frêne antique pilier du monde dans les mythologies scandinaves qui ont inspiré Wagner pour sa tétralogie. D’une part Wotan, le dieu en chef, tire son pouvoir des runes sacrées gravées sur sa lance, elle-même prélevée sur l’Yggdrasil, d’autre part, dans La Walkyrie, il lègue une épée magique en la plantant dans l’arbre-maison de Hunding et Sieglinde.

Cliquez sur le leitmotiv de la lance sacrée

Cent cinquante ans après Wagner, Camille Pépin revient sur la Source d’Yggdrasil.

Cliquez sur la source d’Yggdrasil

Mais avant Wagner, et pendant environ deux siècles, les mythologies étaient les principales sources des livrets d’opéra. Ainsi de Lully qui met en musique dans Atys la déesse Cybèle transformant le héros en pin, pour pouvoir l’aimer toujours.

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Ovide, l’auteur de la première anthologie des mythologies grecques et romaines, nous parle de Philémon et Baucis. Philémon et Baucis forment un couple de vieillards vivant de peu. Zeus et Hermès, déguisés en hommes, frappent à toutes les portes en demandant l’asile. C’est finalement chez Philémon et Baucis qu’ils trouvent le meilleur accueil, les deux vieillards se privant pour bien honorer leurs hôtes. Zeus leur donne le privilège d’être transformés en arbres enlacés après leur mort, afin que rien ne les sépare. Cette légende a connu bien des fortunes en musique, puisqu’elle a inspiré tant Haydn et Gluck que Gounod (Philémon et Baucis [1860]).

Gounod Philémon et Beaucis O riante nature

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Un peu plus tard, Haendel fait chanter à Xerxès dans son opéra éponyme un très bel air célébrant un platane (Air : « ombra mai fu).

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Au début du XIXe siècle, le Tilleul (Der Lindenbaum) est une des plus belles pièces de ce presqu’opéra qu’est le Voyage d’hiver de Schubert.

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Parmi les romantiques, LE musicien romantique français, Berlioz, exprime sa plainte langoureuse à l’ombre d’un if dans « Au cimetière », des Nuits d’été.

Cliquez sur le cimetière romantique

Dans Otello, Verdi fait chanter à Desdémone « la romance du saule ».

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On peut aussi citer à la fin de L’enfant et les sortilèges de Ravel la plainte des arbres qui ont été blessés par l’enfant dans la journée « Chœur : nos blessures ».

Et plus près de nous encore, dans le très beau Like flesh, de Sivan Eldar, l’héroïne finit par se transformer en arbre.

Enfin, je ne serais pas moi si je ne faisais un placement de produit en présentant mon « arbre phylogénétique de l’opéra« .

Et si vous voulez un dernier arbre, cliquez donc sur le bonus surprise mystère :

Cliquez sur le bonus surprise mystère si vous voulez un dernier arbre
Contes et légendes, Mythologie, Nature

SOUS L’OCÉAN

Qu’y a-t-il sous l’océan ? Tout le monde s’est posé la question un jour ou l’autre. Et si la réponse nous venait des compositeurs.

Parmi les figures marines qui nagent sous la surface figurent les redoutables sirènes, dont le chant sublime attirait les marins, qui se jetaient à l’eau pour les rejoindre et se noyaient. On trouve un duo de sirènes dans le King Arthur(1691) de Purcell (Two daughters…) suivi du sublime « How hapy the lovers ».

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Lili Boulanger aussi a mis en musique Les Sirènes.

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Et que dire de ces Sirènes de Cécile Chaminade ?

Cliquez sur les sirènes

Debussy, lui, nous offre cette Cathédrale engloutie.

Cliquez sous la cathédrale

Et Lalo a mis en musique la légende de la ville d’Ys, engloutie sous les eaux, dans son Roi d’Ys.

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Et pour ceux zet celles qui aiment les bonus surprise mystère, vous pourriez aimer celui-ci :

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Divers, Nature, Sciences

MUSIQUE ET MATHÉMATIQUES – 1 – L’HARMONIE : LES ACCORDS ET LES GAMMES

Dans l’antiquité, à l’époque de Pythagore, la musique était une branche des mathématiques. Et la musique était harmonieuse parce qu’elle était mathématique !

Pythagore semble être le premier à avoir théorisé le rapport entre la longueur d’une corde que l’on fait vibrer, et la hauteur du son qu’elle émet en vibrant, sa fréquence. Pour étudier ce phénomène, les pythagoriciens ont inventé un instrument, le monocorde, soit une boîte (de résonance) et une corde dont on pouvait faire varier la longueur tout en la pinçant.

(merci France Musique pour l’image)

Et là, banco ! si on appuie sur le milieu de la corde, on obtient un son plus aigu, mais étrangement harmonieux par rapport au son d’origine. Normal, on joue l’octave, soit une note qui vibre exactement au double de la fréquence originale. Vous pouvez faire l’expérience vous-même si vous avez une guitare, mais un simple élastique tendu entre deux points peut aussi faire l’affaire.

Si vous fixez votre point au quart de la corde, vous obtiendrez encore une note plus aiguë, l’octave de l’octave, soit une note qui vibre quatre fois plus vite que l’originale.

Jusqu’ici, j’ai résonné, avec les pythagoriciens, comme si la note vibrait avec une fréquence pure, une fréquence unique (par exemple, dans notre système musical actuel, la convention que le la des musiciens soit fixé à 440 hertz. Mais dans la nature, les choses sont plus compliquées, et un corps qui vibre le fait avec sa fréquence propre, dite fondamentale, mais aussi avec plein de fréquences supplémentaires, telles que la tierce ou la quinte.

La tierce (majeure) est la note qui vibre avec un rapport de 5/4 par rapport à la fondamentale. La quinte est une note qui vibre avec un rapport de 3/2 par rapport à la fondamentale. On la trouve très facilement en appuyant notre corde ou notre élastique au 2/3 de sa longueur.

En jouant la fondamentale, la tierce majeure et la quinte, on obtient un accord dit parfait. Comme il est naturellement présent dans tous les corps vibrants, nos oreilles sont habituées à l’entendre, même si on n’a aucune connaissance de la musique. On l’entend partout dans la nature, et donc, il nous semble naturel. Beaucoup de musiques, savantes ou populaires, sont bâties sur un tel accord.

Pythagore et ses élèves avaient également trouvé la quarte, soit la note que l’on obtient en appuyant au 3/4 de notre corde vibrante. À partir de ces notes de base, et avec l’aide du calcul des rapports (rappelons que Pythagore était un des plus grands mathématiciens de son époque), ils ont déduit la gamme, constituée de douze notes permettant d’aller d’une fondamentale à son octave. Ainsi, dans la notation musicale telle qu’on l’apprend à l’école, on arrive à cette gamme en do majeur, composée de 6 tons, ou douze 1/2 tons.

(ici : do – ré = un ton, ré -mi = un ton, mi – fa = 1/2 ton, fa – sol = un ton, sol – la = un ton, la – si = un ton et si – do = 1/2 ton).

Cliquez et chantez la gamme avec Julie Andrews

Les choses évoluèrent peu pendant plusieurs siècles, et il faudra que Descartes se penche sur le problème des résonances et de l’harmonie dans son Musicae compendium. Ce livre inspirera Rameau qui achèvera de théoriser les rapports entre la fréquence fondamentaloe d’une corde qui vibre et ses différents harmoniques dans son Traité de l’Harmonie réduite à ses principes naturels. Il y écrit « La musique est une science physico-mathématique; le son en est l’objet et les rapports trouvés entre différents sons en sont l’objet mathématique. Sa fin est de plaire et d’exciter en nous diverses passions. »

Je vous disais plus haut qu’on trouvait ces accords et ces harmonies parfaites dans beaucoup d’œuvres. Je vous propose ici le motet de J.-S. Bach Lobet den Herrn, alle Heiden, qui commence par une belle montée « fondamentale, tierce, quinte, octave » sur o-o-o-o (avant de se compliquer un peu) !

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Le triton, ou diabolus in musica, est composé de trois tons entiers. Il a longtemps été interdit, car étant la musique du diable. Bien entendu, ce tabou a disparu avec le temps et on trouve un très bel exemple de triton dans l’air « Maria » de West Side Story de Bernstein.

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Les accords « de base » ont été pendant des siècles les seuls recommandés pour l’écriture de la musique, mais au fil du temps, et l’oreille des musiciens s’accoutumant à ces accords, les plus audacieux des compositeurs se sont lancés dans leurs œuvres sur des accords auparavant interdits, car jugés trop dissonants. Il semblerait que ce soit Liszt qui ce soit le premier débarrassé du corset de la tonalité, dans sa bagatelle appelée, justement, « sans tonalité », c’est-à-dire qu’il n’y a plus dans cette œuvre de note de référence, de fondamentale, sur laquelle toutes les autres notes s’appuient. Vingt ans après Liszt, le Viennois Arnold Schönberg théorisera cette égalité entre les douze sons de la gamme, en créant le dodécaphonisme (dodéca = 12).

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(Source : même si cela fait longtemps que j’ai envie d’écrire sur ce thème Musique et mathématiques, je dois mentionner ici la série de podcasts que France Musique diffuse cet été.)

Retrouvez ici le deuxième article sur les mathématiques et la musique, consacré à la mesure et à la décomposition du temps.

Divers, Fantaisie, Histoire de l'opéra, Mes opéras préférés, Nature, Premier avril, Sciences

LE CANTIQUE DES QUANTIQUES

L’événement semble passer largement inaperçu, c’est pourtant ce soir (1er avril 2023) que sera créé, en direct du CERN sous les yeux des spectateurs, le dernier opéra de Stephen HAWKING, et le premier opéra quantique de l’histoire.

On se souvient de la catastrophique production de l’Opéra de Paris, convoquant Stephen Hawking dans une mise en scène de la Damnation de Faust de BERLIOZ (avec l’approche simpliste suivante, Faust = savant et savant = Hawking).

Berlioz la Damnation de Faust final (Hawking)Cliquez sur l’image

Mais ce n’est pas de cet « hommage » raté que je vais vous parler aujourd’hui, mais bien de la création du premier opéra quantique de l’histoire, sous-titré « Des Trous de vers au cœur des trous noirs« .

Suivant le classement de G.B.SHAW, nous sommes ici dans une configuration originale (S+B / TdV ), puisqu’une étoile (soprano) est attirée par un trou noir (basse), alors qu’un trou de vers (TdV) cherche à les séparer.

Le pitch : Les trous noirs sont des régions singulières de l’espace-temps, créées par l’effondrement d’une étoile supermassive sur elle-même, créant un champ gravitationnel si intense que la matière qui l’approche ne peut s’en échapper. Mieux, la lumière elle-même, composée de photons, est attirée inéluctablement par le trou noir. Dès lors, aucune lumière ne peut en provenir, d’où le nom de trou noir.

Ligo Gravitational Wave ChirpCliquez sur la coalescence de deux trous noirs

Acte I : En 1974, le physicien Stephen Hawking, dans le cadre de ses travaux sur la thermodynamique des trous noirs a suggéré que les trous noirs détruisent l’information contenue dans les objets qu’ils absorbent, ce qui est contraire aux lois les plus élémentaires de la physique quantique.

Monty Python Galaxy Song, by Stephen HawkingCliquez sur Stephen Hawking interprétant le Galaxy song des Monthy Python

Acte II : Hawking a montré que les trous noirs ne sont pas si noirs que ça. En fait, ils s’évaporent suivant le « rayonnement de Hawking », jusqu’à disparaître complètement (bon, d’accord, le temps qu’ils s’évaporent, l’univers aura largement eu le temps de disparaître, donc on n’est pas près d’observer ce phénomène.) Il a aussi montré que lors de la création de deux particules virtuelles de part et d’autre de l’horizon du trou noir, une de ces particules reste en dehors alors que l’autre est absorbée par le trou noir. Là où ça se complique, c’est que ces particules sont physiquement intriquées, c’est-à-dire que toute l’information de l’une est partagée par l’autre, alors que l’une des deux est phagocytée par le trou noir, et que son information est donc perdue.

Waksman Protonic GamesCliquez sur l’accélérateur du CERN

L’œuvre précédente s’appelle Protonic Game, de Fabien WAKSMAN. Ce compositeur a également écrit un cycle de 9 mélodies intitulées Hawking Songs, sur des poèmes de Jean-Philippe UZAN. Vous pouvez en entendre 3 d’entre eux en cliquant sur le lien suivant (de la minute 24 à la minute 39,5) :

Waksman Hawking SongsCliquez sur l’émission de France Musique

Acte III : Pour résoudre cet amusant paradoxe, les physiciens en sont venus à l’idée que deux trous noirs pouvaient être reliés entre eux par un « trou de vers », et que de l’information pouvait ainsi circuler d’un trou noir à l’autre. Ils ont nommé l’île la région intérieure du trou noir pouvant ainsi être échangée.

Varèse IonisationsCliquez sur Ionisations

(Source : Une île au cœur des trous noirs, Pour la Science n°542, décembre 2022.)

Le livret ayant été écrit en partie à partir de la Petite Cosmogonie portative de Raymond QUENEAU, il n’est pas surprenant que l’Opéra de Saint-Glinglin ait d’ores et déjà planifié une reprise de cette œuvre le 1er avril 2024.

P.S. J’avais déjà bien avancé sur la préparation de ce billet quand je suis tombé sur le podcast « Astrophysique et musique avec Jean-Pierre Uzan« , qui m’a permis de trouver quelques idées supplémentaires. Vous pouvez cliquer pour arriver sur le podcast complet.

Et si vous voulez un peu plus de zizique, vous pouvez toujours cliquer sur le bonus surprise mystère.

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Retrouvez d’autres articles publiés un 1er avril :

Havre & Caumartin.

Arnoldo Poivrieri.

La fée nommée mène au logis (de l’esprit).

Mythologie, Nature

DES ÉTOILES À L’OPÉRA (2e série)

Après une première série d’étoiles brillant à l’opéra il y a un an, je vous en propose une seconde série.

Dans Orlando Furioso (1727) de VIVALDI, Angelica répond à Médor son bonheur d’être avec lui (Air : Andromède , fille de Cassiopée et femme de Persée. À sa mort, Athéna la place dans les constellations, près de Persée et Cassiopée.Chiara al pari di lucida stella.)

Andromède était la fille de Cassiopée et femme de Persée. À sa mort, Athéna la place dans les constellations, près de Persée et Cassiopée. CORNEILLE écrira en 1750 une tragédie qui sera mise en musique par DASSOUCY. Cette musique aujourd’hui perdue avait été précédée par l’Andromeda liberata de MANELLI, dès 1637.

Manelli Andromeda liberataCliquez sur l’image

À la fin de Castor et Pollux de RAMEAU (1754), Jupiter ému par le comportement des jumeaux leur assure l’éternité en leur réservant une place dans le ciel.

Propulsons-nous d’un siècle dans le temps et retrouvons GOUNOD et son Roméo et Juliette (1869) avec le fameux air de Roméo « Ah, lève-toi, soleil ! ».

Gounod Roméo et Juliette Ah, lève-toi, soleil

En 1877, CHABRIER écrit l’opéra-bouffe l’Étoile.

Chabrier l'Étoile Couplets du palCliquez sur l’image

En 1880, le tout jeune DEBUSSY écrit sa mélodie Nuits d’étoiles

Debussy Nuit d'étoiles (Véronique Gens)Cliquez sur l’image

Passons à présent au XXe siècle, avec Peter Grimes de BRITTEN.

Britten Peter Grimes Now the great bearCliquez sur Peter Grimes

De 1971 à 1974, MESSIAEN écrit son œuvre des Canyons aux Étoiles, inspirée par un voyage en Utah.

Messiaen des Canyons aux étoiles les Ressuscités et le chant de l'étoile d'AldébaranCliquez sur l’image

Et si vous en voulez un peu plus, cliquez donc sur le bonus surprise mystère.

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Compositrices, Couleurs, Nature

ARC-EN-CIEL

Joséphine du blog « Nervures et entailles » ayant récemment publié un article intitulé « Arc-en-ciel » m’a demandé si je comptais faire un billet sur « arcs-en-ciel et opéra ». Le voici donc.

L’arc-en-ciel est un des plus beaux phénomènes que la nature nous offre. Il est le résultat de la diffraction de la lumière sur les gouttelettes contenues dans l’air pendant la pluie. Comme l’indice de réfraction de l’air dépend de la longueur d’onde, la lumière du soleil qui comporte toutes les longeurs d’onde se trouve ainsi décomposée suivant un spectre continu qui va de l’ultra-violet à l’infrarouge. Pour l’observer, il faut donc deux conditions qui ne sont pas souvent réunies : de la pluie et du soleil ! On peut aussi créer artificiellement un arc-en-ciel à l’aide d’un prisme cristallin.

Pink Floyd Dark side of the moon Brain DamageCliquez sur le prisme décomposant la lumière et formant un arc-en-ciel

Il y a donc une infinité de nuances dans l’arc-en-ciel, mais l’œil humain en distingue principalement sept : le rouge, l’orange, le jaune, le vert, le bleu, l’indigo et le violet.

Le premier exemple d’arc-en-ciel qui m’est venu à l’esprit quand j’ai imaginé ce billet est celui qui clôt l’Or du Rhin (Rheingold) de WAGNER. La demeure des dieux, le Walhalla est achevé. Donner provoque un orage et Froh crée un arc-en-ciel par lequel les dieux peuvent rejoindre leur demeure.

Wagner Rheingold finalCliquez sur l’arc-en-ciel

À l’acte II du Saint-François d’Assise, de MESSIAEN, apparaît un bien curieux Ange voyageur, aux ailes quinticolores (les mots sont de Messiaen lui-même).

Messiaen Sint-François d'Assise, l'Ange voyageurCliquez sur l’image

Le même Messiaen a intitulé le 6e mouvement de son Quatuor pour la fin des temps « Fouillis d’Arcs-en-ciel, pour l’Ange qui annonce la fin du temps ».

Messiaen Quatuor pour la fin des temps Fouillis d'Arc-en-CielCliquez sur l’Arc-en-ciel

Dans ses Musiques d’enfants, PROKOFIEV a écrit la pièce « Pluie et Arc-en-ciel ».

Prokofiev Musiques d'enfants la Pluie et l'Arc-en-CielCliquez sur Prokofiev jeune

Et la compositrice australienne Jeanell CARRIGAN a composé ce bel Arc-en-ciel.

Carrigan Arc-en-CielCliquez sur l’image

Dans un autre genre, celui de la comédie musicale, The Wizard of Oz (le Magicien d’Oz) (1939) comporte un « tube des tubes » avec Somewhere over the Rainbow.

The Wizard of Oz Somewhere over the RainbowCliquez sur Judy Garland

Bien sûr, sur le thème de l’Arc-en-ciel, j’aurais pu écrire un tout autre billet. Le drapeau Arc-en-ciel (je ne parle pas de la Wiphala du Pérou) est l’emblème de la communauté LGBT. J’aurais donc pu illustrer l’arc-en-ciel avec des opéras queers, comme Like Flesh, de Sivan ELDAR, Les Mamelles de Tirésias de POULENC ou encore A quiet Place de BERNSTEIN ou Billy Budd de BRITTEN. Qu’en pensez-vous ?

Et pour voir tous les drapeaux de pays qui ont un arc-en-ciel, il faut aller chez l’incontournable John Duff.

Compositrices, Couleurs, Divers, Nature

VERT

En ce jour du printemps, quoi de plus naturel que de vous parler du vert, couleur assez facilement associée à cette saison ?

Avant d’aller plus loin, voyons ce que nous en dit le grand spécialiste en couleurs Arthur Arc-en-ciel RIMBAUD, dans son Sonnet des voyelles :

U, cycles, vibrements divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d’animaux, paix des rides

Pour Rimbaud, donc, la lettre associée au vert est le U, et dans son sonnet, il y a associé le vert de la mer ainsi que celui des pâtures.

Revenons à ce terme : viride. Selon le CNRTL, il signifie « qui tire sur le vert, verdissant ». On le retrouve dans la notion de « viriditas », la force de la germination, omniprésente dans l’œuvre d’Hildegarde von BINGEN.

Hildegard von Bingen O viriditas digiti deiCliquez sur l’image

Le vert de la nature est chanté par Ruggiero dans Alcina de HAENDEL, avec l’air « Verdi pratti » (Vertes prairies).

Haendel Alcina Verdi pratiCliquez sur Bradamante, Morgana et Ruggiero

Le vert, c’est aussi la couleur de l’espérance. Ainsi, si vous mélangez le bleu et le jaune qui composent le drapeau de l’Ukraine, vous obtenez le vert de l’espérance, espérance que ce pays se sorte de l’agression ignoble dont il est en ce moment victime.

Pierre HENRY, la mort verte.

Dans la symbolique chrétienne, le vert est la couleur de l’espoir de la délivrance, et le Graal est réputé être vert émeraude. Je vous propose ici d’écouter « l’enchantement du Vendredi saint, extrait du Parsifal de WAGNER.

Cliquez sur l’image

Le vert est la couleur de Vénus, la déesse de l’Amour comme le rouge est la couleur de Mars, le dieu de la guerre. Son surnom « anadyomène » signifie « celle qui sort de l’eau », d’où la couleur verte qui lui est associée.

Blow Venus and AdonisCliquez sur l’image

Le vert, symbole de la renaissance et de la vigueur de la nature, se trouve également associé à la vigueur du sexe, ainsi le surnom de « Vert galant » donné au roi Henry IV. Mais vous souveniez-vous que dans l’histoire de l’opéra, c’est le mariage d’Henry IV et de Marie de Médicis en 1600 qui a donné le la (415) à l’opéra ? ce mariage fut l’occasion de représentations fastueuses données à Florence, avec la création musicale d’une œuvre de Giacopo PERI, l’Euridice. De retour à Mantoue, le duc de cette ville, employeur de MONTEVERDI, demanda à ce dernier une œuvre capable de rivaliser en faste avec l’Euridice. Monteverdi répondra avec son Orfeo, considéré comme le premier opéra de l’histoire.

Monteverdi Orfeo Acte ICliquez sur les nymphes

(Source principale pour la partie symbolique : Encyclopédie des symboles, le livre de poche, collection la Pochothèque, 1996).

Retrouvez d’autres nuances de VERT sur le blog « Nervures et entailles » de Joséphine.

Et retrouvez mes autres billets consacrés aux couleurs :

Blanc

Bleu

Rouge

Rose

Compositrices, littérature, Mes opéras préférés, Mythologie, Nature

LIKE FLESH, de Sivan ELDAR (2022)

Grande émotion en ce mois de janvier 2022 à l’Opéra de Lille avec la création mondiale de l’opéra Like Flesh, de la compositrice israélienne Sivan ELDAR, sur un livret de la Britannique Cordelia LYNN. L’équipe artistique était complétée par la metteuse en scène italienne Silvia COSTA et le chef d’orchestre français Maxime PASCAL.

Like Flesh présentation opéra de LilleCliquez sur Caroline SONRIER, directrice de l’Opéra de Lille

Commandé par les opéras de Lille, Montpellier et Nancy en 2018, Like Flesh est donc l’aboutissement de plus de 3 ans de travail, pour lequel la compositrice a dû mettre en musique les mots de la librettiste, alors que la metteuse en scène a dû pour une fois, non pas déconstruire une histoire déjà connue de tous (ou presque) pour en proposer une autre lecture, mais au contraire nous proposer une scénographie nous permettant de comprendre une histoire que nous ne connaissons a priori pas déjà. Pour cela, elle s’est appuyée sur les avancées permises par la technologie, notamment avec un dispositif s’appuyant sur une intelligence artificielle pour animer les vidéos qui accompagnent le déroulement de l’action.

Eldar Like Flesh inteview Silvia CostaCliquez sur l’image pour entendre Silvia COSTA

La musique est composée pour un orchestre de chambre amplifié (sonorisé) et un second « orchestre » de 64 haut-parleurs disséminés dans la salle pour permettre au public d’être immergé dans le son des arbres.

Eldar Like Flesh Teaser de l'IRCAMCliquez sur la bande-annonce de l’IRCAM 

Eldar Like Flesh Maxime PascalCliquez sur l’image pour entendre Maxime PASCAL

Les personnages principaux de Like Flesh sont la Forêt, le Forestier (qui coupe les arbres), sa femme et une étudiante venue dans la forêt pour apprendre.

Le pitch : La Femme est malheureuse en mariage et aspire à un monde au-delà des frontières de la chair. L’arrivée dans la forêt de l’étudiante va lui faire découvrir un autre amour, et la poussera à se métamorphoser en arbre. Mais le monde est dur même pour les arbres, et après sa métamorphose, elle sera encore convoitée par le forestier pour l’argent qu’il pourra tirer de son bois et par l’amante qui continue à l’aimer.

Le thème de la métamorphose en arbre est librement inspiré des Métamorphoses d’OVIDE, et notamment de la légende de Daphné qui, poursuivie par Apollon, se transforme en laurier pour lui échapper.

Eldar Like Flesh Teaser Opéra de LilleCliquez sur la bande-annonce de l’Opéra de Lille

La construction narrative se fait suivant une alternance de scènes où la forêt (représentée par le chœur) s’exprime et d’autres où les humains parlent.

I : Ce que savait la forêt. La forêt nous raconte son passé depuis les temps immémoriaux.

II : Les oiseaux ne viennent plus ici. Pendant que le forestier expose sa vision de la forêt : du capital, la femme se désole de voir tout bétonné et la vie – plantes, insectes et oiseaux – qui s’en va.

III : Ce qu’ont fait les arbres. Les arbres annoncent la désertification de la Terre.

IV : La couleur rouge. L’étudiante arrive pour essayer de comprendre la vie, les arbres, la communion entre tous les arbres.

V : Leçons qu’apprend la gentillesse. La femme demande à son mari ce que ressentent les arbres quand il les coupe.

VI : Ce qu’a fait l’humain. L’humain est venu dans la forêt avec une hache, et nous avons crié de joie : « Regardez, le manche est des nôtres ! ».

VII : Le troisième rêve. La femme et l’étudiante découvrent leur amour naissant. La femme se métamorphose en arbre.

VIII : Ce qu’a fait l’humain après. Dans un crépitement de mots, la forêt égrène une litanie de tous les objets que créent les humains.

IX : Donc. Ta femme s’est changée en arbre. L’étudiante a appris au forestier que sa femme s’est changé en arbre. L’homme voit déjà le bénéfice qu’il pourra en tirer.

X : Regrets. Le forestier et sa femme discutent. Il se demande comment il aurait dû faire pour que leur amour perdure.

XI . Ce qu’a vu la forêt. La forêt sait la violence dont sont capables les hommes. Elle a la mémoire des juifs pendus à ses branches.

XII : Un arbre se souvient. L’étudiante et l’arbre discutent. Le forestier dit que l’étudiante dort dans les branches de son arbre. Mais les machines humaines arrivent , qui vont tout dévaster.

XIII : Entrelacement. Dans ce duo forêt, femme/arbre, la femme répond à la forêt que l’étudiante l’a blessée en voulant graver son amour sur l’écorce.

XIV : Comportement du bois. Le forestier et l’étudiante échangent leur perception de la femme devenue arbre.

Cliquez sur l’image

XV : L’hiver, à nouveau. Le forestier et l’étudiante concluent. L’étudiante a cherché à devenir arbre, comme son aimée, mais n’a pas réussi, alors elle en a fendu le tronc pour venir s’y loger/lover alors que le forestier, lui, ne cherche qu’à entretenir ce bois qu’il pourra un jour couper pour le vendre.

La forêt a le dernier mot : Écoutez. La vie, pleine d’espoir se forme dans les failles. Nos racines poussent en chantant, trouvent d’étranges fossiles : un arbre, un squelette, une hache.

(Sources principales : le dossier de presse de l’Opéra de Lille, la présentation par l’équipe artistique le 12 janvier, et bien sûr la création le 21 janvier 2022.)

Couleurs, Divers, Jazz, Nature

BLEU

Carré bleu sur fond bleu, d’après Malevitch

Un récent commentaire sur le blog de Lazuli Biloba sur les aspects debussystes de ses magnifiques photos de fleurs bleues m’a amené à me poser la question de la représentation du bleu en musique.

Dans la nature, le bleu est la couleur du ciel (le jour) et de l’eau, soit symboliquement, une couleur rattachée à l’air et à l’eau. Dans la religion chrétienne, on associe le bleu aux vêtements de Marie.

Rachmaninoff Ave MariaCliquez sur l’Ave Maria de Rachmaninov

Bien sûr, en musique quand on dit bleu, on pense assez vite au Beau Danube bleu de Johann STRAUSS, ou encore à la Rhapsody in blue, de Georges GERSHWIN.

Strauss An der schönen blauen DonauCliquez sur la version chantée du beau Danube bleu

Gershwin Rhapsody in bluePuis cliquez sur la rhapsody in blue

Un peu moins évidentes sont les références à Barbe bleue, et donc aux cinq opéras (au moins) mettant en scène ce personnage, dont la légende nous vient de Gilles de RAY, maréchal de France, compagnon de guerre de Jeanne d’Arc et zigouilleur de petits enfants.

Aboulker douce et Barbe-bleueCliquez sur Douce et Barbe-bleue

Maurice RAVEL, dont on connaît le goût pour les sonorités nouvelles du jazz intitulera le deuxième mouvement de sa sonate pour violon et piano « Blues ».

Ravel Sonate violon piano bluesCliquez sur la violoniste et le pianiste

Pour Olivier MESSIAEN, qui était synesthète (il associait des couleurs aux accords sonores), le bleu s’apparente à la sonorité de la flûte. Il a par ailleurs écrit, dans son catalogue d’oiseaux, le Merle bleu.

Messiaen le Merle bleuCliquez sur Yvonne Loriod

Autre synesthète, Alexandre SCRIABINE et son « clavier à lumière », sorte d’orgue qui projetait des couleurs pendant qu’on exécutait son œuvre, telle que Prométhée ou le poème du feu.

À propos de Scriabine, ce compositeur qui associait musique et peinture faisait partie du mouvement « Der Blaue Reiter » (« le Cavalier bleu »), mouvement artistique fondé autour de KANDINSKY et de l’expressionnisme en 1911 et 1912. Un autre compositeur a fait partie du « Blau Reiter », c’est Arnold SCHÖNBERG, qui était aussi peintre et a écrit un article et une partition pour ce groupe, sur un texte du poète MAETERLINCK.

Schönberg Herzgewächse op 20Cliquez sur l’opus 20 de Schönberg

Bien entendu, le blues, c’est aussi une part important de la musique de jazz (dont je ne suis pas spécialiste). Parmi les grands classiques du jazz figure Kind of Blues de Miles DAVIS.

Miles Davis Kind of BlueCliquez sur un album de légende du jazz

Dans le Sonnet des voyelles de RIMBAUD, le « O » est associé à la couleur bleu. Pour le caractériser dans la suite du poème, il écrit : « O, suprême Clairon plein des strideurs étranges, ».

Bizet Carmen clairons qui sonnent la retraiteCliquez sur les strideurs étranges du suprême clairon

Et si vous avez eu le courage d’arriver jusqu’ici, je vous propose un bonus surprise.

Point d'interrogationCliquez sur le bonus surprise si vous avez eu le courage d’arriver jusqu’ici

Après le bleu, retrouvez ici la notion de BLANC de ROUGE et de VERT en musique.

Ainsi que le ROSE.

Contes et légendes, Mythologie, Nature

TROIS PETITES POMMES (ET UN DRAGON ?)

Et même quatre petites pommes si l’on considère le début de la cinquième Symphonie de BEETHOVEN pour ce qu’il est : Pomme pomme pomme pomme.

Beethoven Pom pom pom pomCliquez sur les instrumentistes

Carnets paresseux avait commencé une histoire avec trois petites pommes qui chantaient et un dragon, mais il semble que la suite se soit perdue dans une faille spatio-temporelle. Pour vous permettre de patienter en attendant cette suite, voici un entremets sur le thème de la pomme. [Le dragon dans la pomme – Carnets Paresseux (wordpress.com).]

La pomme est un fruit très ancien, puisqu’on en trouve trace dans la Bible, et même dans le premier livre de la Bible, la Genèse, autant dire au commencement de tout. Il y est dit qu’au jardin d’Eden, la pomme était le fruit de l’arbre de la Connaissance. Ce fruit était interdit aux deux premiers humains, mais le malin, tentateur, s’est débrouillé pour qu’Adam croque la pomme. Pour cela, Adam et Eve ont été chassés du Paradis.

On trouve des pommes dans presque tous les grands mythes de l’humanité. Ainsi chez les Grecs, Dionysos, le dieu du vin, aurait créé la pomme pour l’offrir à Aphrodite, la déesse de l’amour. Un peu plus tard, la déesse de la discorde (eh oui, il y avait une déesse de la discorde !) jeta une pomme d’or au milieu des dieux, la fameuse pomme de la discorde. Il revint au berger Pâris de remettre cette pomme à la plus belle des déesses.

En 1667, l’Italien CESTI écrira à l’occasion du mariage de l’empereur Léopold et de l’infante Marguerite d’Espagne un opéra sur cette légende, Il pomo d’oro, qui devait dépasser en fastes tout ce qui s’était fait jusque là, et qui durait dix heures (sur deux soirées).

Cesti Il pomo d'OroCliquez sur l’image

Deux siècles plus tard, en 1864, OFFENBACH nous rappellera la légende dans son opérette la belle Hélène, (air « Au mont Ida trois déesses ».)

Offenbach la belle Hélène Au mont Ida trois déessesCliquez sur Pâris

Encore des pommes pour Héraklès (Hercule), puisque dans ses douze travaux, il a dû aller cueillir les Pommes d’or du jardin des Hespérides.

Dans la mythologie nordique, c’est la déesse Idunn qui possédait des pommes qui donnaient la jeunesse éternelle à ceux qui les mangeaient. Cette déesse a été recyclée par WAGNER dans sa lecture des mythologiques Germano-Nordiques qu’est la Tétralogie, en la personne de Freia. Freia, donc, possédait des pommes qui donnaient la jeunesse éternelle à ceux qui les mangeaient. Malheureusement Wotan, le dieu en chef, avait promis Freia pour le paiement de la construction du Walhalla aux deux géants Fafner et Fasholt. (Cette histoire nous est racontée dans l’Or du Rhin [Rheingold].) Suite au vol de l’Or du Rhin par le gnome Alberich, Wotan propose aux géants cet or (qu’il va voler) en échange de Freia. Et c’est là que nous retrouvons le dragon du titre, puisqu’après avoir reçu l’or du Rhin, Fafner tue son frère Fasholt pour garder l’or et va se retirer dans une grotte, métamorphosé en dragon pour mieux veiller sur son or.

Wagner Das Rheingold FreiaCliquez sur Freia, ses pommes, et Wotan

On trouve une pomme plus récente dans la légende de Guillaume Tell, mise en musique par ROSSINI. Au troisième acte, Guillaume n’ayant pas voulu se prosterner devant le chapeau du bailli Gessler, le bailli le fait arrêter avec son fils Jemmy, et demande qu’on place une pomme sur la tête de celui-ci, Guillaume devant transpercer cette pomme avec une flèche (ce qui est très dangereux, n’essayez pas ce tour à la maison).

Rossini Guillaume Tell Ah que ton âme se rassure (Jemmy)Cliquez sur l’image

Rossini était un fin gourmet et aimait donner des noms de ses œuvres à ses créations culinaires, c’est donc très logiquement qu’il a appelé une recette de Tarte aux pommes « Tarte Guillaume Tell ».

On retrouve Offenbach avec son opérette Pomme d’Api (1873).

Offenbach Pomme d'ApiCliquez sur l’image

Quand les explorateurs occidentaux sont revenus d’Extrême-Orient avec des oranges, ce fruit inconnu chez nous a été appelé « pomme de Chine » ou « pomme d’orenge ». On en trouve trace dans l’opéra de PROKOFIEV, l’Amour des trois oranges.

Prokofiev 3 oranges NinetteCliquez sur la princesse Ninette et le prince

(Source principale [pour la mythologie] : Encyclopédie des Symboles, le Livre de poche, collection la Pochothèque, 2013.)

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