Compositrices, Divers, Historique, littérature

LES FEMMES ET LA MUSIQUE AU MOYEN ÂGE, d’Anne IBOS-AUGÉ. 2 – Les musiciennes dans l’univers profane.

Vous connaissez mon intérêt pour les compositrices aussi, quand Françoise Objois m’a parlé de la conférence d’Anne Ibos-Augé sur « les femmes et la musique au Moyen Âge », je n’ai pas pu ne pas y assister. Son livre, divisé en trois parties, est une mine d’informations sur le Moyen Âge.

Après l’article consacré aux actrices du monde religieux, je vous propose la deuxième partie, la musique dans l’univers profane.

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II.1 la poétesse compositrice

Le saviez-vous ? (moi, je l’ignorais), le féminin de troubadour est trobairitz.

La première d’entre elles est Azalaïs de Porcairagues, autrice d’une seule canso, Ar em al freg temp vengut (voici venu le temps du froid). Malheureusement, cette poésie est parvenue jusqu’à nous sans musique et les musiciens d’aujourd’hui doivent recourir à d’autres mélodies pour pouvoir la restituer au mieux. Le principe était d’ailleurs connu (et pratiqué) au Moyen Âge !

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Qu’est-ce que l’amour courtois, chanté par les troubadours et les trobairitz ? C’est un « idéal de vie, où l’homme courtois doit posséder des manières distinguées et un esprit fin… et par-dessus tout, il doit aimer de fin’amor, d’amour courtois » (pp. 108-109). L’amour courtois est exclusif et constant.

Les trouveresses en France d’Oïl et au-delà. Parmi les compositrices en langue d’oïl, on trouve Blanche de Castille, la mère de Saint-Louis, autrice d’une Chanson à la Vierge.

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II.2 la ménestrelle

Parisa était, avec son mari Janin, ménestriers de bouche. Les ménestrels, ou ménestriers, représentaient à l’époque tout type de musicien. Les chanteurs étaient appelés ménestriers de bouche, alors que les musiciens militaires étaient appelés ménestriers de guerre.

Parisa et Janin ont exercé leur métier de musiciens à la cour de Savoie autour de l’année 1400. Le métier de ces ménestriers était d’animer en musique les nombreuses fêtes de la cour, mais aussi d’accompagner les seigneurs en voyage ou à la guerre. (On retrouvera plus tard cette fonction chez les chansonniers, comme Charles Favart qui était chansonnier du duc de Saxe.)

II.3 La mécène

La comtesse Marie de Champagne (1145-vers 1202) est la première fille d’Aliénor d’Aquitaine et du roi Louis VII. Elle soutient les lettres et de la musique comme sa mère, et plusieurs auteurs de son époque, dont Chrétien de Troyes, lui dédicacent certains de leurs écrits.

III – Fictions et représentations

La troisième partie traite de la représentation des femmes dans les fictions de l’époque.

III.1 la femme sujet

Ainsi de Marion, dans le Jeu de Robin et Marion, d’Adam de la Halle. Les jeux étaient une forme de théâtre mêlé de musique, préfigurant (de loin) l’opéra (cf. l’arbre phylogénétique de l’opéra).

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III.2 la musicienne de fiction

On connaît généralement l’Yseut de la légende de Tristan et Yseut, mais quelle découverte que l’aspect musicienne d’Yseut. Dans la version de Gottfried de Strasbourg, Yseut est une musicienne et compositrice accomplie. Elle écrit au moins trois lais, dont une lettre poème destinée à être chantée par Tristan quand il la lira.

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Bien sûr, il y a encore beaucoup d’autres choses dans ce livre, alors le mieux, c’est quand même de le lire.

(Source : Les Femmes et la musique au Moyen Âge de Anne Ibos-Augé, éditions du Cerf, 2025.)

littérature, Oulipo, Poésie

« LE VAMPIRE », de BAUDELAIRE (1851)

Après « Feuillet d’album », de Mallarmé, je vous propose ce mois-ci un poème de Baudelaire, « le Vampire », paru en 1857 dans les Fleurs du mal.

(Rappel du principe, je prends un poème parmi mes préférés, et j’illustre les images évoquées par ce poème par des citations musicales en rapport [pour moi] avec ces images.)

Toi qui, comme un coup de couteau,
Dans mon cœur plaintif es entrée ;
Toi qui, forte comme un troupeau
De démons, vins, folle et parée,

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De mon esprit humilié
Faire ton lit et ton domaine ;
– Infâme à qui je suis lié
Comme le forçat à la chaîne,

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Comme au jeu le joueur têtu,

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Comme à la bouteille l’ivrogne,
Comme aux vermines la charogne
– Maudite, maudite sois-tu !

J’ai prié le glaive rapide
De conquérir ma liberté,
Et j’ai dit au poison perfide
De secourir ma lâcheté.

Hélas ! le poison et le glaive
M’ont pris en dédain et m’ont dit :
« Tu n’es pas digne qu’on t’enlève
À ton esclavage maudit,

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Imbécile ! – de son empire
Si nos efforts te délivraient,
Tes baisers ressusciteraient
Le cadavre de ton vampire ! »

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Citations musicales :

un troupeau de démons : Berlioz, la Damnation de Faust, pandaemonium.

lié comme le forçat à la chaîne : Beethoven Fidelio, « O welche Lust ».

le joueur : Prokofiev, le Joueur.

ton esclavage maudit : Saint-Saëns, Samson et Dalila, « Dieu d’Israël ».

ton vampire : Marschner, le Vampire, ouverture.

Divers, Poésie

LES MÉLODIES DE FAURÉ

Compositeur de l’intime, même son Requiem est doux et apaisé, Gabriel Fauré a écrit beaucoup de mélodies. Ses huit premiers opus sont d’ailleurs des recueils de mélodies.

Je vous propose donc ici une petite sélection de ces mélodies, un genre qu’il affectionnait et qu’il a pratiqué tout au long de sa carrière.

L’Opus 1 contient, « le Papillon et la Fleur », sur un poème de Victor Hugo, et « Mai ».

Cliquez sur n°1 de l’opus 1

L’Opus 4 contient « le Lamento du pêcheur », un texte de Théophile Gautier retenu par Berlioz dans ses Nuits d’été.

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L’Opus 5 contient « Chant d’automne », sur un poème de Charles Baudelaire.

Cliquez sur le n° 1 de l’opus 5

L’Opus 7 contient le fameux « Après un rêve ».

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L’Opus 39 contient « les Roses d’Ispahan ».

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L’Opus 46 contient son fameux « Clair de lune », sur un poème de Paul Verlaine.

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L’Opus 51 contient « au Cimetière », un autre poème de Gautier retenu par Hector Berlioz dans ses Nuits d’été.

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L’Opus 61, la bonne Chanson, est un recueil de 9 mélodies sur des textes de Paul Verlaine.

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Enfin, un de ses tout derniers ouvrages, l’Opus 118 intitulé l’Horizon chimérique, est un cycle de mélodies sur des poèmes de Jean de la Ville de Mirmont.

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Compositrices, Divers, Historique, littérature

LES FEMMES ET LA MUSIQUE AU MOYEN ÂGE, d’Anne IBOS-AUGÉ. 1 – Les actrices du monde religieux.

Vous connaissez mon intérêt pour les compositrices, aussi quand Françoise Objois m’a parlé de la conférence d’Anne Ibos-Augé sur « les femmes et la musique au Moyen Âge », je n’ai pas pu ne pas y assister. Son livre, divisé en trois parties, est une mine d’informations sur le moyen-âge.

I – Les actrices du monde religieux.

I.1 – la moniale

Herrade de Hohenburg (vers 1125-1195), abbesse du couvent de Hohenburg sur le mont Sainte-Odile. Elle a écrit l’Hortus deliciarum (le Jardin des délices), soit 45000 vers, 67 poèmes lyriques dont 12 notés musicalement, 400 images. C’est une compilation de textes divers, destinée à l’éducation des moniales.

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Organisation de la musique dans les couvents : il s’agissait essentiellement de psaumes et d’hymnes. La cantrix dirigeait le chœur, apprenait à chanter à ses consœurs, mais aussi à lire et écrire la musique.

De cette époque, le Codex de Las Huelgas (XIIIe siècle) est probablement la plus importante source de polyphonies féminines. Planctus o monialis concio.

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I.2 – la béguine

Les béguines étaient des femmes qui vivaient en marge de la société, sans avoir nécessairement prononcé de vœux religieux.

Parmi elles, Hadewijch d’Anvers (première moitié du XIIIe siècle) est une poétesse et, peut-être, compositrice brabançonne. Elle connaissait la poésie courtoise française. À côté de ses 45 poèmes, Hadewijch a écrit 14 visions, ainsi que des lettres. Les Visions (mystiques) figurent un parcours initiatique la menant vers le Christ rédempteur, largement musicales. Vers la fin du XIIIe siècle, les béguines peuvent être payées pour chanter, notamment lors des messes d’enterrement.

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I.3 – la mystique

La plus connue des musiciennes du moyen âge est certainement Hildegarde de Bingen qui a écrit trois livres de « visions », le Scivias écrit en 1151, le Liber vitae meritorium, écrit entre 1158 et 1163, et le Liber divinorum operum écrit à partir de 1158. Dans ces visions, inspirées par l’Esprit-Saint, Hildegarde s’exprime notamment sur « l’essence divine de la musique et sur ses trois principales fonctions : se rappeler la voix d’Adam avant la chute, susciter la dévotion grâce à la beauté, se pénétrer des chants de Dieu » (Page 63).

Dans sa Symphonia armonie celestium revelationum, ses compositions musicales louent la Sainte Trinité, la vierge Marie, les Vierges, les Veuves et les Innocents. Hildegarde est aussi l’autrice du premier drame liturgique, l’Ordo virtutum (Page 65).

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Page 71 Voir en musique. Anne Ibos-Augé nous explique comment la musique peut être un préambule à la vision, la musique « déclenchant » ces visions. Mais la vision déclenchée, la mystique peut entendre de la musique à l’intérieur de cette vision.

I.4 – la copiste

Dans ce chapitre, l’organisation des ateliers de copie est détaillée, ainsi que la fabrication des encres ou des parchemins. On y apprend la différence entre écrire (un texte) et noter ce texte, c’est çà dire mettre des notes sous le texte pour pouvoir le chanter.

Suit une description de la notation musicale au moyen-âge (page 90).

Retrouvez sur ce site la deuxième partie : II – Les musiciennes dans l’univers profane

(Source : Les Femmes et la musique au Moyen Âge de Anne Ibos-Augé, éditions du Cerf, 2025).

Compositeurs, Compositrices, Histoire de l'opéra, littérature

IL EST LÀ, IL EST LÀ, IL EST LÀ, MON DEUXIÈME LIVRE !

Eh oui, mon opus 2 vient de sortir aux éditions Le Lys bleu.

Ce deuxième volume est consacré aux Écrivains, dramaturges et librettistes et contient cinquante-huit biographies d’écrivains dont les œuvres ont suscité des opéras ou des pièces musicales.

Les écrivains choisis vont des tragiques Grecs (Eschyle, Sophocle et Euripide) à Boris Vian, en passant par Shakespeare, Cervantès et Molière ou encore Goethe, Pouchkine et Scribe. Comme pour le premier livre, j’ai inséré un QR Code qui vous permettra, en l’activant, d’arriver sur la page idoine de mon site, et donc d’écouter toutes les jolies musiques que je cite dans le livre.

Vous pouvez le commander directement sur le site de l’éditeur :

Si vous optez pour cette solution, n’hésitez pas à saisir le code promo LLB5 pour bénéficier d’une réduction de 5%.

Vous pouvez également le commander chez votre libraire ou dans votre grande surface culturelle préférée.

(P.S. il me reste quelques exemplaires de mon opus 1, Compositeurs et compositrices, que vous pouvez me commander via le formulaire de contact de mon site.)

(P.P.S. : vous pouvez aussi me commander l’opus 2, je vous ferai bénéficier du prix auteur, et vous pourrez avoir une chouette dédicace personnalisée).

littérature, Mallarmé, Oulipo, Poésie

FEUILLET D’ALBUM, de MALLARMÉ (1890)

Après « Le miroir brisé« , de Jacques Prévert, je vous propose ce mois-ci un poème de Mallarmé, « Feuillet d’album ».

(Rappel du principe, je prends un poème parmi mes préférés, et j’illustre les images évoquées par ce poème par des citations musicales en rapport [pour moi] avec ces images.)

Ce sonnet a été écrit pour la fille d’un ami poëte de Mallarmé.

Tout à coup et comme par jeu

Mademoiselle qui voulûtes

Ouïr se révéler un peu

Le bois de mes diverses flûtes

Cliquez sur le flûtiste

Il me semble que cet essai

Tenté devant un paysage

A du bon quand je le cessai

Pour vous regarder au visage

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Oui ce vain souffle que j’exclus

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Jusqu’à la dernière limite

Selon mes quelques doigts perclus

Manque de moyens s’il imite

Votre très naturel et clair

Rire d’enfant qui charme l’air.

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Citations musicales :

Mes diverses flûtes : Debussy, Syrinx.

Ce vain souffle : Verdi, La Traviata « Adio del passato ».

Au visage : Poulenc, Sept chansons « Belle et ressemblante ».

Rire d’enfant : Aboulker, Douce et Barbe-bleue.

Jazz, littérature, Mes opéras préférés

L’ÉCUME DES JOURS, d’Edison DENISOV (1986)

L’Écume des jours, drame lyrique en 3 actes et 14 tableaux d’Edison Denisov, a été créé le 15 mars 1986 à l’Opéra-Comique, à Paris. C’est une adaptation par Denisov lui-même du roman éponyme de Boris Vian, que son ami Raymond Queneau qualifiait de « plus poignant roman d’amour contemporain ».

Edison Denisov a travaillé pendant 12 ans à cet opéra. On trouve dans sa partition des allusions à Chlo-e, de Duke Ellington, ou à Tristan de Wagner.

Cliquez sur l’archive de L’INA

39 ans après la création à l’Opéra-Comique, on pourra entendre et voir l’Écume des jours à l’Opéra de Lille du 5 au 15 novembre 2025.

Le pitch : Colin et Chloé, deux jeunes gens insouciants, s’aiment. Chloé tombe malade. Colin est obligé de travailler pour pouvoir acheter les fleurs qui peuvent guérir Chloé. Chloé meurt.

Acte I : Premier tableau, chez Colin. Colin chante en s’habillant. Il a invité son ami Chick à dîner. Colin montre son pianocktail, un piano de son invention qui sert à faire les cocktails, à Chick. La conversion porte sur Jean-Sol Partre, un philosophe dont Chick est fou, et sur la musique de jazz.

Deuxième tableau, à la patinoire Molitor. Sur fond d’un chœur qui chante « Ne vous mariez pas, les filles », Colin et Chick retrouvent Alise, puis Nicolas, oncle d’Alise et cuisinier de Colin, et Isis, qui les invite à l’anniversaire de son chien.

Troisième tableau, chez Isis. Chick et Alise se querellent quand arrive Chloé, qui plaît beaucoup à Colin. Il lui demande si elle a été arrangée par Duke Ellington.

Cliquez sur le Duke

Quatrième tableau, le rendez-vous. Colin monologue quand Chloé le rejoint : scène de séduction et promenade.

Cinquième tableau, la noce. Colin et Chloé, puis chœur. « Chérie, viens près de moi ».

Acte II : Sixième tableau, le voyage. Colin et Chloé, avec Nicolas, discutent en voiture du travail et de son inutilité.

Septième tableau, chez Colin. Colin et Chloé se réveillent. Chloé est malade, et Colin remarque que la lumière faiblit.

Huitième tableau, la pharmacie. Le pharmacien exécute l’ordonnance de Colin. Colin et Chloé discutent de la maladie de Chloé : elle a un nénuphar qui pousse dans le poumon.

Neuvième tableau : chez Colin. La lumière a beaucoup diminué. Chloé est étendue, entourée de fleurs destinées à « faire peur au nénuphar ». La musique fait entendre une citation de Tristan.

Acte III : Dixième tableau, l’usine d’armes. Colin l’insouciant est désormais obligé de travailler, pour payer les fleurs de Chloé. Le directeur de l’usine d’armes explique le travail à Colin. Il doit s’allonger sur les graines d’armes pour leur fournir la chaleur nécessaire à leur croissance.

Onzième tableau, chez Colin. Alise vient voir Colin et se confie à lui. L’obsession de Chick pour Jean-Sol Partre le détourne d’elle.

Douzième tableau, la mort de Chick. Les policiers viennent saisir les biens de Chick, qui s’est ruiné pour acheter des manuscrits de Partre. Ils veulent saisir ses écrits quand Chick se révolte et menace de les tuer. Les policiers l’abattent.

Treizième tableau, la mort de Chloé. Dialogue entre Colin et Jésus. Colin lui reproche d’avoir fait mourir Chloé. Chœur : Agnus Dei, puis Requiem.

Quatorzième tableau, épilogue. Le chat et la souris : la souris se sacrifie en proposant au chat de la manger, afin de sauver Colin. Chœur des orphelines.

Cliquez sur l’archive russe (en russe) de 1990

(Source principale : les représentations de la création à l’Opéra-Comique en 1986, et le programme associé.)

littérature, Oulipo, Poésie

« LE MIROIR BRISÉ », de Jacques PRÉVERT (1945)

Après « Le Pont Mirabeau« , de Guillaume Apollinaire, je vous propose ce mois-ci un poème de Jacques Prévert, « le Miroir brisé », extrait de Paroles.

(Rappel du principe, je prends un poème parmi mes préférés, et j’illustre les images évoquées par ce poème par des citations musicales en rapport [pour moi] avec ces images.)

Le petit homme qui chantait sans cesse

le petit homme qui dansait dans ma tête

le petit homme de la jeunesse

a cassé son lacet de soulier

et toutes les baraques de la fête

tout d’un coup se sont écroulées

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et dans le silence de cette fête

dans le désert de cette tête

j’ai entendu ta voix heureuse

ta voix déchirée et fragile

enfantine et désolée

venant de loin et qui m’appelait

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et j’ai mis ma main sur mon cœur

où remuait

ensanglantés

les sept éclats de glace de ton rire étoilé.

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Citations musicales :

Toutes les barques de la fête tout d’un coup se sont écroulées : Leoncavallo Paillasse « Vesti la Giubba »

Ta voix déchirée et fragile enfantine et désolée… qui m’appelait : Ravel L’Enfant et les Sortilèges, final (Ma-man)

Mon cœur… ensanglantés : Poulenc Banalités « Sanglots ».

Animation 1, Écrivains, Contes et légendes, littérature

HANS CHRISTIAN ANDERSEN (1805-1875)

Hans Christian Andersen est né à Odense, au Danemark, le 2 avril 1805, dans une famille modeste. Son père meurt quand il a 11 ans. Très jeune, Hans Christian s’intéresse au théâtre. Il est également doté d’une belle voix, et prend des cours de chant. En 1822, grâce au directeur du Théâtre royal, Jonas Collin, qui l’avait pris en amitié, Andersen obtient une bourse d’études et entre au collège, à l’âge de 17 ans !

En 1827, ses premiers poèmes sont publiés dans un journal. En 1828, c’est un récit de voyage qui est publié, le Voyage à pied à Amager. Après une parution en journal, le Voyage paraît en livre et rencontre un beau succès.

En 1833, Andersen voyage en Allemagne où il rencontre le compositeur Louis Spohr, avant de se rendre à Paris où il fait la connaissance de Cherubini et de Heine. Il poursuit son périple par la Suisse et l’Italie.

Quand il vit au Danemark, il est très proche de la famille de Collin, dont il tombera amoureux de la fille, Louise. Cet amour demeurera sans suite.

En 1835, Hans Christian publie un recueil de Contes de fées.

En 1847, lors d’un voyage en Angleterre, il est accueilli par Charles Dickens.

À partir de 1860, Andersen est reçu par la famille royale du Danemark, où il lit des contes aux enfants royaux.

En 1867, il est nommé citoyen d’honneur de la ville d’Odense. C’est le début de sa reconnaissance par le Danemark. Il renonce peu à peu à ses voyages partout en Europe.

Hans Christian Andersen meurt d’un cancer du foie à Copenhague le 4 août 1875, à l’âge de 70 ans.

Ce n’est pas par ses romans, encore moins par ses pièces de théâtre qui n’ont jamais rencontré le succès, que le nom d’Andersen nous est resté. Son legs à l’humanité, ce sont ses contes, qu’il a écrits de 1832 à 1848. Une bonne partie d’entre eux ont été mis en musique.

La princesse au petit pois (1835), premier des trois contes de Gérard Pesson. Opéra pour enfants de Ernst Toch (1927).

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La petite sirène (1837), ballet de Henriques (1906), film de Disney (2007) et Ponyo sur la falaise de Miyazaki (2008). Le sujet de la petite Sirène est proche de celui d’Ondine (1816) d’E.T.A. Hoffmann, qui inspirera à Dvorak sa Rusalka.

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Les habits neufs de l’empereur (1837) Gyorgi Ranki (1953)

Le vaillant soldat de plomb (1838) ballet de Balanchine sur la musique de Jeux d’enfants de Bizet (1975).

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Le jardin du paradis (1839) a inspiré à Debussy Ce qu’a vu le vent d’ouest.

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Le vilain petit canard (1842) mis en musique par Prokofiev (1914)

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Le Rossignol et l’empereur de Chine (1843) adapté par Stravinsky (1909).

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La reine des neiges (1844) opéra de Sergeï Banevitch (1979) et film de Disney (2013).

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La bergère et le ramoneur (1845) a fait l’objet du dessin animé de ce nom par Paul Grimaud et Jacques Prévert (1953), repris sous le nom de le Roi et l’Oiseau avec une musique de Joseph Kosma.

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La petite fille aux allumettes (1845) a suscité deux opéras de August Enna (1897) et de Helmut Lachenmann (1996).

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littérature

URSULE MIROUËT, de BALZAC (1841)

Ursule Mirouët est un roman de Balzac qui fait partie, dans la Comédie humaine, des Scènes de la vie de Province. Si je vous en parle sur ce site consacré à la musique et à la littérature, c’est d’abord parce que c’est un très bon roman et aussi parce que Balzac se sert de la musique pour décrire les états d’âme de l’héroïne, Ursule Mirouët.

Le pitch : Dans une petite ville de province (Nemours), le vieux docteur Minoret se retire avec sa pupille Ursule Mirouët. Sa fortune, qu’il veut laisser à Ursule après sa mort, attise la convoitise de sa famille, qui réussit à voler et détourner l’héritage. Ursule aime Savinien de Portenduère, un héritier de la noblesse ancienne, mais la mère de Savinien ne veut pas d’une mésalliance dans sa famille. Pauvre Ursule !

On trouve les deux personnages d’Ursule Mirouët et de Savinien de Portenduère dans Béatrix, du même Balzac.

Très vite, on apprend que, « dans sa jeunesse, le docteur (Minoret) épousa par amour… la fille du fameux claveciniste Valentin Mirouët, une célèbre musicienne, faible et délicate… (page 784). Cette musicienne s’appelait Ursule Mirouët, comme notre héroïne. La jeune Ursule se trouve être la petite-fille du beau-père du docteur Minoret« .

Cette filiation est expliquée page 812 : « Le beau-père du docteur, le fameux claveciniste et facteur d’instruments Valentin Mirouët, un de nos plus célèbres organistes, était mort en 1785… À son lit de mort, il n’eut pas la consolation, de voir cet enfant gâté. Chanteur et compositeur, Joseph Mirouët, après avoir débuté aux Italiens sous un nom supposé, s’était enfui avec une jeune fille en Allemagne… Joseph Mirouët, doté par la nature d’une voix séduisante… et par-dessus tout compositeur plein de goût et de verve, mena pendant quinze ans cette vie bohémienne que le Berlinois Hoffmann a si bien décrite… Il s’établit à Hambourg où il épousa la fille d’un bon bourgeois, folle de musique, qui s’éprit de l’artiste« .

Cliquez sur le Berlinois Hoffmann

Ursule était une jeune fille très pieuse, qui s’était donné pour mission de conduire son tuteur à l’église. Le docteur avait pour ami le juge de paix et le curé de Nemours, avec qui ils avaient l’habitude de jouer au tric-trac. Un jour, Ursule se joignit à eux et gagna. Pour la remercier, Minoret se décide enfin à lui payer des cours de piano (page 819) : « le lendemain, Minoret, qui jusqu’alors avait refusé de faire apprendre la musique à sa pupille, se rendit à Paris, y acheta un piano, prit des arrangements à Fontainebleau avec une maîtresse et se soumit à l’ennui que devaient lui causer les perpétuelles études de sa pupille… La petite fille devint excellente musicienne… Les incrédules n’aiment pas la musique, céleste langage développé par le catholicisme, qui a pris les noms des sept notes dans un de ses hymnes : chaque note est la première syllabe des sept premiers vers de l’hymne à Saint-Jean.« 

Dans Ursule Mirouët, Balzac consacre de nombreuses pages à ce qu’on appelait à l’époque le « magnétisme animal » et aux théories du célèbre magnétiseur Mesmer. (page 821) : « Vers la fin du XVIIIe siècle, la Science fut aussi profondément divisée par l’apparition de Mesmer, que l’art le fut par celle de Gluck… Mesmer eut donc des adeptes et des antagonistes aussi ardents que les piccinnistes contre les gluckistes.« 

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Page 831, alors que le docteur va voir une « somnambule » pour savoir ce que pense sa pupille, celle-ci lui annonce, à propos d’Ursule pensant à Savinien : « Voici ce qu’elle pense : « Si je chantais bien, si j’avais une belle voix, quand il sera chez sa mère, ma voix irait bien jusqu’à ses oreilles. » C’est donc bien par le chant qu’Ursule espère conquérir le cœur de Savinien.

Page 841 : « Pendant que sa filleule jouait à son parrain des variations sur la Dernière Pensée de Weber« 

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Page 847-848 : La famille du docteur Minoret, voyant l’emprise qu’a la jeune Ursule sur le docteur, se décide à aller chez lui et tenter de le charmer. C’est l’occasion pour Balzac de montrer la bêtise crasse de la famille : « On nous dit que votre filleule a un si beau talent sur le forte , que nous serions bien enchantées de l’entendre. Mme Crémière et moi sommes disposées à prendre son maître pour nos petites; car s’il avait sept ou huit élèves, il pourrait mettre le prix de ses leçons à la portée de nos fortunes…

Volontiers, dit le vieillard, et cela se trouvera d’autant mieux que je veux aussi donner un maître de chant à Ursule.« 

Page 870 : « L’abbé Chaperon entendit en entrant le son du piano. La pauvre Ursule achevait la symphonie en la de Beethoven… Plus la musique est belle, moins les ignorants la goûtent… Ah ! voilà ce qui coûte si cher, dit Mme Crémière à Mme Massin.

Cliquez sur la Symphonie en la

Dieu me garde de donner de l’argent pour que ma petite fille me fasse des charivaris pareils dans la maison, répondit Mme Massin.

Elle dit que c’est du Béthovan, qui passe cependant pour un grand musicien, dit le receveur, il a de la réputation.

Ma foi, ce ne sera pas à Nemours, reprit Mme Crémière, et il est bien nommé Bête à vent…

Il faut que M. le juge de paix aime bien jouer pour entendre ces sonacles, dit Mme Crémière.« 

Lors de la première rencontre entre Savinien et Ursule, le charme de la musique agit déjà puisque Savinien déclare (page 878) : « J’espère, monsieur le docteur, que vous me recevrez chez vous; j’aime la musique, et je me souviens d’avoir entendu le piano de Mlle Ursule.« 

Pages 890-891, Balzac nous livre un étonnant aveu de l’impuissance des mots à transmettre certaines émotions que seule la musique peut permettre de communiquer : « Il arrive souvent qu’un morceau pauvre en lui-même, mais exécuté par une jeune fille sous l’empire d’un sentiment profond, fasse plus d’impression qu’une grande ouverture pompeusement dite par un orchestre habile. Il existe en toute musique, outre la pensée du compositeur, l’âme de l’exécutant, qui, par un privilège acquis seulement à cet art, peut donner du sens et de la poésie à des phrases sans grande valeur. Chopin prouve aujourd’hui pour l’ingrat piano la vérité de ce fait déjà démontré par Paganini pour le violon.

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Ce beau génie est moins un musicien qu’une âme qui se rend sensible et qui se communiquerait par toute sorte de musique, même par de simples accords. Par sa sublime et périlleuse organisation, Ursule appartenait à cette école de génies si rares; mais le vieux Schmucke, le maître qui venait chaque samedi et qui pendant le séjour d’Ursule à Paris la vit tous les jours, avait porté le talent de son élève à toute sa perfection. Le Songe de Rousseau, morceau choisi par Ursule, une des compositions de la jeunesse d’Hérold, ne manque pas d’ailleurs d’une certaine profondeur qui peut se développer à l’exécution; elle y jeta les sentiments qui l’agitaient et justifia bien le titre de Caprice que porte ce fragment… Savinien pénétra donc dans ce délicieux royaume, entraîné par ce cœur qui, pour s’interpréter lui-même, empruntait la puissance du seul art qui parle à la pensée par la pensée elle-même, sans le secours de la parole, des couleurs ou de la forme.« 

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Par l’effet de calomnies, Ursule croit que Savinien va se marier avec une autre, et se réfugie dans la musique. Et c’est par la musique que l’ignoble Goupil, qui voudrait se marier avec Ursule, essaye de la conquérir (page 944) : « … Ursule joua du piano fort tard, elle se coucha presque rassurée et accablée de sommeil. À minuit environ, elle fut réveillée par un concert composé d’une clarinette, d’un hautbois, d’une flûte, d’un cornet à pistons, d’un trombone, d’un basson, d’un flageolet et d’un triangle…« 

Page 945 : « La sérénade était, à ce qu’il paraît, charmante ! Il y avait un cornet à pistons ! – Qu’est-ce qu’un piston ? – Un nouvel instrument de musique ! … Trois jours après, au milieu de la nuit, trois violons, une flûte, une guitare et un hautbois donnèrent une seconde sérénade… il lut cette terrible prophétie : Tu n’épouseras pas Ursule. Si tu veux qu’elle vive, hâte-toi de la céder à celui qui l’aime plus que tu ne l’aimes ; car il s’est fait musicien et artiste pour lui plaire, et préfère la voir morte à la savoir ta femme.« 

Je ne vais pas vous raconter la fin, pour ne pas divulgacher l’histoire, mais je peux quand même dire que Balzac nous réserve une fin étonnante, avec l’apparition d’un fantôme !

(Source principale : La Comédie humaine, Ursule Mirouët, bibliothèque de la Pléiade, volume III, éditions Gallimard 1976.)