littérature, Oulipo, Poésie

« LE VAMPIRE », de BAUDELAIRE (1851)

Après « Feuillet d’album », de Mallarmé, je vous propose ce mois-ci un poème de Baudelaire, « le Vampire », paru en 1857 dans les Fleurs du mal.

(Rappel du principe, je prends un poème parmi mes préférés, et j’illustre les images évoquées par ce poème par des citations musicales en rapport [pour moi] avec ces images.)

Toi qui, comme un coup de couteau,
Dans mon cœur plaintif es entrée ;
Toi qui, forte comme un troupeau
De démons, vins, folle et parée,

Cliquez sur l’image

De mon esprit humilié
Faire ton lit et ton domaine ;
– Infâme à qui je suis lié
Comme le forçat à la chaîne,

Cliquez sur l’image

Comme au jeu le joueur têtu,

Cliquez sur l’image

Comme à la bouteille l’ivrogne,
Comme aux vermines la charogne
– Maudite, maudite sois-tu !

J’ai prié le glaive rapide
De conquérir ma liberté,
Et j’ai dit au poison perfide
De secourir ma lâcheté.

Hélas ! le poison et le glaive
M’ont pris en dédain et m’ont dit :
« Tu n’es pas digne qu’on t’enlève
À ton esclavage maudit,

Cliquez sur l’image

Imbécile ! – de son empire
Si nos efforts te délivraient,
Tes baisers ressusciteraient
Le cadavre de ton vampire ! »

Cliquez sur l’image

Citations musicales :

un troupeau de démons : Berlioz, la Damnation de Faust, pandaemonium.

lié comme le forçat à la chaîne : Beethoven Fidelio, « O welche Lust ».

le joueur : Prokofiev, le Joueur.

ton esclavage maudit : Saint-Saëns, Samson et Dalila, « Dieu d’Israël ».

ton vampire : Marschner, le Vampire, ouverture.

Divers, Poésie

LES MÉLODIES DE FAURÉ

Compositeur de l’intime, même son Requiem est doux et apaisé, Gabriel Fauré a écrit beaucoup de mélodies. Ses huit premiers opus sont d’ailleurs des recueils de mélodies.

Je vous propose donc ici une petite sélection de ces mélodies, un genre qu’il affectionnait et qu’il a pratiqué tout au long de sa carrière.

L’Opus 1 contient, « le Papillon et la Fleur », sur un poème de Victor Hugo, et « Mai ».

Cliquez sur n°1 de l’opus 1

L’Opus 4 contient « le Lamento du pêcheur », un texte de Théophile Gautier retenu par Berlioz dans ses Nuits d’été.

Cliquez sur l’image

L’Opus 5 contient « Chant d’automne », sur un poème de Charles Baudelaire.

Cliquez sur le n° 1 de l’opus 5

L’Opus 7 contient le fameux « Après un rêve ».

Cliquez sur l’image

L’Opus 39 contient « les Roses d’Ispahan ».

Cliquez sur l’image

L’Opus 46 contient son fameux « Clair de lune », sur un poème de Paul Verlaine.

Cliquez sur l’image

L’Opus 51 contient « au Cimetière », un autre poème de Gautier retenu par Hector Berlioz dans ses Nuits d’été.

Cliquez sur l’image

L’Opus 61, la bonne Chanson, est un recueil de 9 mélodies sur des textes de Paul Verlaine.

Cliquez sur l’image

Enfin, un de ses tout derniers ouvrages, l’Opus 118 intitulé l’Horizon chimérique, est un cycle de mélodies sur des poèmes de Jean de la Ville de Mirmont.

Cliquez sur l’image
littérature, Mallarmé, Oulipo, Poésie

FEUILLET D’ALBUM, de MALLARMÉ (1890)

Après « Le miroir brisé« , de Jacques Prévert, je vous propose ce mois-ci un poème de Mallarmé, « Feuillet d’album ».

(Rappel du principe, je prends un poème parmi mes préférés, et j’illustre les images évoquées par ce poème par des citations musicales en rapport [pour moi] avec ces images.)

Ce sonnet a été écrit pour la fille d’un ami poëte de Mallarmé.

Tout à coup et comme par jeu

Mademoiselle qui voulûtes

Ouïr se révéler un peu

Le bois de mes diverses flûtes

Cliquez sur le flûtiste

Il me semble que cet essai

Tenté devant un paysage

A du bon quand je le cessai

Pour vous regarder au visage

Cliquez sur l’image

Oui ce vain souffle que j’exclus

Cliquez sur l’image

Jusqu’à la dernière limite

Selon mes quelques doigts perclus

Manque de moyens s’il imite

Votre très naturel et clair

Rire d’enfant qui charme l’air.

Cliquez sur les enfants

Citations musicales :

Mes diverses flûtes : Debussy, Syrinx.

Ce vain souffle : Verdi, La Traviata « Adio del passato ».

Au visage : Poulenc, Sept chansons « Belle et ressemblante ».

Rire d’enfant : Aboulker, Douce et Barbe-bleue.

littérature, Oulipo, Poésie

« LE MIROIR BRISÉ », de Jacques PRÉVERT (1945)

Après « Le Pont Mirabeau« , de Guillaume Apollinaire, je vous propose ce mois-ci un poème de Jacques Prévert, « le Miroir brisé », extrait de Paroles.

(Rappel du principe, je prends un poème parmi mes préférés, et j’illustre les images évoquées par ce poème par des citations musicales en rapport [pour moi] avec ces images.)

Le petit homme qui chantait sans cesse

le petit homme qui dansait dans ma tête

le petit homme de la jeunesse

a cassé son lacet de soulier

et toutes les baraques de la fête

tout d’un coup se sont écroulées

Cliquez sur l’image

et dans le silence de cette fête

dans le désert de cette tête

j’ai entendu ta voix heureuse

ta voix déchirée et fragile

enfantine et désolée

venant de loin et qui m’appelait

Cliquez sur l’image

et j’ai mis ma main sur mon cœur

où remuait

ensanglantés

les sept éclats de glace de ton rire étoilé.

Cliquez sur l’image

Citations musicales :

Toutes les barques de la fête tout d’un coup se sont écroulées : Leoncavallo Paillasse « Vesti la Giubba »

Ta voix déchirée et fragile enfantine et désolée… qui m’appelait : Ravel L’Enfant et les Sortilèges, final (Ma-man)

Mon cœur… ensanglantés : Poulenc Banalités « Sanglots ».

Oulipo, Poésie

« LE PONT MIRABEAU » , d’APOLLINAIRE (1913)

Après « Les fontaines ne chantent plus« , de Raymond Queneau, je vous propose ce mois-ci un poème de Guillaume Apollinaire, « le Pont Mirabeau », extrait d’Alcools (1913).

(Rappel du principe, je prends un poème parmi mes préférés, et j’illustre les images évoquées par ce poème par des citations musicales en rapport [pour moi] avec ces images.)

Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Et nos amours
Faut-il qu’il m’en souvienne
La joie venait toujours après la peine

Cliquez sur l’image

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure

Les mains dans les mains restons face à face
Tandis que sous
Le pont de nos bras passe
Des éternels regards l’onde si lasse

Cliquez sur l’image

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure

L’amour s’en va comme cette eau courante
L’amour s’en va
Comme la vie est lente
Et comme l’Espérance est violente

Cliquez sur la Speranza

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure

Passent les jours et passent les semaines
Ni temps passé
Ni les amours reviennent
Sous le pont Mirabeau coule la Seine

Cliquez sur l’image

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure

Citations musicales :

après la peine : Poulenc sept chansons, « Marie ».

Des éternels regards : Messiaen Vingt regards sur l’Enfant-Jésus.

l’Espérance : Rossini Trois chœurs religieux « la Speranza« .

Ni les amours reviennent : Chausson Poème de l’amour et de la mer « La mort de l’amour ».

Agenda Ironique, littérature, Oulipo, Poésie

« LA RIEN QUE LA TOUTE LA », de François Le LIONNAIS

Ce(s) mois-ci, c’est Carnets Paresseux qui nous suggère l’Agenda Ironique de l’été 2025.

Le thème principal en est… Rien !

Voici donc ce qu’il nous demande, Carnets Paresseux :

Récapitulons : rien, le sujet ; les mots imposés haricot, asymptote, ragondin et billevesée ; des mots à éviter : activité, programme, obligation, aristotélicien, gouvernement. Et la forme que vous voulez.

Et puis du mystère, du calendrier, du suspense, des jours et des dates de juillet et d’août ; enfin, évidemment, de l’ironie. Autant que possible, aucun jeu de mots : de la tenue, du style, et pourquoi pas, une morale.

Mais tout ceci est tellement mieux esspliqué chez lui.

Après avoir tout dit sur rien, je vous propose ici mon traditionnel « poème mis en musique à ma façon », avec ce mois-ci La rien que la toute la, de François le Lionnais, soit le premier sonnet écrit sans nom, sans verbe et sans adjectif, sans haricot, sans ragondin, sans asymptote, et surtout sans la moindre billevesée.

Vous vous vous, parce que mais nul dont ce aucune
Quand de ce (pour avec) et ce pourquoi jamais  ;

Cliquez sur l’image

Seulement le et les et déjà si quand nous
Au et contre ces qui d’où vous aussi vous des.

 
Quelque enfin, pas ne tant depuis tout après une
Car si du en auprès (comme un qui je pour vous).

Cliquez sur l’opéra urbain

Et même… Il en leur la plus que ce je ne te
Maintenant et cela ou tel toujours sans très.

 
Là de des puisque vous, moins que pour dont, autour
Desquels celui ne parmi et jusqu’alors – non
Dans le de et par – la qu’il comme la et seuls

Cliquez sur l’image


Désormais tu son donc  ! et tu bien les ici
Mais grâce à lorsque sur dont un les des en eux
Tu Tu Tu à travers les nul dont ce aucune.

Cliquez sur les danseuses en tutu

Citations musicales :

Jamais : Poe / Slatkin, le Corbeau.

Comme un qui je pour vous : Attia, Molière, l’opéra urbain « les Précieuses ridicules ».

Seuls : Purcell « Oh Solitude ».

Tu Tu : Tchaïkovski le Lac des Cygnes.

Poésie

QUELQUES NOUVEAUX HAÏKAÏS (8ème SÉRIE)

C’est l’été et je suis en vacances loin de tout. Quoi de mieux alors qu’une petite série de haïkus (ou haïkaïs) improvisés pour profiter de cette période ?

Le haïkaï (ou haïku) est une forme de poésie japonaise visant à évoquer en quelques mots l’essence des choses. Il se compose, dans notre alphabet occidental, de 3 vers de cinq, sept et cinq pieds.

Didon et Enée

Un opéra de Purcell

La mort de Didon

Cliquez sur la mrot de Didon

Premier opéra

L’orfeo, Monteverdi

Déjà tout est dit !

Cliquez sur l’image

Fable écologique

Like Flesh de Sivan Eldar

Une métamorphose.

Cliquez sur l’image

Madame Butterfly

Sur la mer calmée monte une fumée

Pauvre Cio-Cio-San.

Cliquez sur cette pauvre cio-Cio-San

Et vous pouvez toujours m’envoyer vos haïkus en commentaire. S’ils m’inspirent, je les intégrerai dans une prochaine livraison.

Agenda Ironique, littérature, Oulipo, Poésie

UN RIEN DE POÉSIE

Ce(s) mois-ci, c’est Carnets Paresseux qui nous suggère l’Agenda Ironique de l’été 2025.

Le thème principal en est… Rien !

Voici donc ce qu’il nous demande, Carnets Paresseux :

Récapitulons : rien, le sujet ; les mots imposés haricot, asymptote, ragondin et billevesée ; des mots à éviter : activité, programme, obligation, aristotélicien, gouvernement. Et la forme que vous voulez.

Et puis du mystère, du calendrier, du suspense, des jours et des dates de juillet et d’août ; enfin, évidemment, de l’ironie. Autant que possible, aucun jeu de mots : de la tenue, du style, et pourquoi pas, une morale.

Mais tout ceci est tellement mieux esspliqué chez lui.

On définit généralement un expert comme étant quelqu’un qui connaît un maximum de choses sur un sujet très restreint. Si on pousse ce raisonnement asymptotiquement, on infère que le climax de l’expertise est donc de connaître Tout sur rien !

Mine de rien, la référence musicale évidente sur le rien en musique doit être le fameux Air de rien de John Cage, plus connu sous son titre 4 mn 33 s.

Cliquez sur l’image

Jean Tardieu nous propose, dans la Môme néant, un bel exemple de rien en poésie :

Quoi qu’a dit ? A dit rin.

Quoi qu’a fait ? A fait rin.

À quoi qu’ a pense ? A pense a rin.

Pourquoi qu’a dit rien ? pourquoi qu’a fait rin ? Pourquoi qu’a pense a rin ?

A’ xiste pas.

Le plus beau discours que je connaisse sur le rien est dû à Raymond Devos, avec son sketch Parler pour ne rien dire.

Cliquez sur l’image

Mais trève de billevesées, revenons à un univers qui m’est cher, celui de l’opéra (je ne sais pas si vous avez remarqué, mais l’univers de l’opéra m’est cher). Comme le rappelle Vladimir Jankelevitch dans ses ouvrages de musicologie, c’est avec la mort de Mélisande qu’on s’approche le plus près du mystère du passage de la vie à la mort : « Elle est partie sans rien dire, je n’ai rien entendu ».

Cliquez sur l’image

Les historiens de la musique nous le disent, Hector Berlioz jouait du flageolet dans sa jeunesse. Il ne s’agit évidemment pas du haricot, mais bel et bien d’une petite flûte. Mais ce vaurien n’a pas suvi les conseils de son père, qui voulait faire de lui un médecin. Passant plus de temps dans les théâtres que dans les amphihéâtres, il finira compositeur. Dans sa Symphonie fantastique (1830), il mettra en scène de façon spectaculaire l’ancien thème grégorien du Dies Irae.

Cliquez sur l’image

Un rien plus tard, en 1836, Meyerbeer s’est servi d’un hymne non pas grégorien, mais luthérien, pour l’ouverture de son Grand opéra à la française, les Huguenots.

Cliquez sur le vieil hymne luthérien

Et si, arrivé là, vous en voulez encore, cliquez donc sur le bonus surprise mystère.

Cliquez donc sur le bonus surprise mystère
littérature, Oulipo, Poésie

« LES FONTAINES NE CHANTENT PLUS », de QUENEAU

Après avoir brittenisé le poème La musique, de Baudelaire, je vous propose ce mois-ci un retour à Raymond Queneau, avec « les Fontaines ne chantent plus », extrait du recueil Courir les rues (éditions Gallimard, 1967).

(Rappel du principe, je prends un poème parmi mes préférés, et j’illustre les images évoquées par ce poème par des citations musicales en rapport [pour moi] avec ces images.)

Je meurs d’ennui hauprès de la fontaine

Cliquez sur l’image

le vent se tasse il va bientôt noircir

le jour décroît peut-être il va mourir

peut-être il va couler avec l’eau de la Seine

Cliquez sur l’image

peut-être il va doucement s’endormir

en ne laissant que trace de silence

Les oiseaux sont muets

Cliquez sur l’image

un commerçant ferme les volets de sa

boutique

quelqu’un passe il vient d’acheter

du pain

Cliquez sur l’image

Je meurs d’ennui hauprès de la fontaine

Citations musicales :

hauprès de la fontaine : Debussy Pelléas et Mélisande « Scène de la fontaine ».

couler avec l’eau de la Seine : Poulenc / Apollinaire Sept chansons « Marie ».

Les oiseaux sont muets : Satie Daphénéo.

du pain : Wagner Parsifal « l’enchantement du vendredi saint ».

littérature, Oulipo, Poésie

« LA MUSIQUE », de Charles BAUDELAIRE (5 – BRITTEN)

Après avoir wagnerisé le poème La musique, de Baudelaire, puis debussysé, puis encore fauréïsé, et encore Beethovenisé ce même poème, je vous propose une cinquième version de ce poème traité à la sauce OuLiPo.

(Rappel du principe, je prends un poème parmi mes préférés, et j’illustre les images évoquées par ce poème par des citations musicales en rapport [pour moi] avec ces images.)

Aujourd’hui donc, en voici une version Brittenisée.

La musique souvent me prend comme une mer !

Cliquez sur l’image

Vers ma pâle étoile,
Sous un plafond de brume ou dans un vaste éther,
Je mets à la voile ;

Cliquez sur l’image

La poitrine en avant et les poumons gonflés
Comme de la toile,
J’escalade le dos des flots amoncelés
Que la nuit me voile ;

Je sens vibrer en moi toutes les passions
D’un vaisseau qui souffre ;

Le bon vent, la tempête et ses convulsions

Cliquez sur la tempête

Sur l’immense gouffre

Me bercent. D’autres fois, calme plat, grand miroir
De mon désespoir !

Cliquez sur la berceuse

Citations musicales :

Comme une mer : Peter Grimes, 4 interludes orchestraux.

Les poumons gonflés : Peter Grimes Now the great bear (Maintenant, la grande ourse).

La tempête : Peter Grimes la tempête

Me bercent : A Charm of lullabies (berceuses)