Après le Pitre châtié de Stéphane MALLARMÉ, je vous propose un autre poème traité à la sauce OuLiPo, choisi dans le riche corpus mallarméen. (Rappel du principe, je prends un poème parmi mes préférés, et j’illustre les images évoquées par ce poème par des citations musicales en rapport avec ces images.)
Aujourd’hui, donc, je vous propose En envoyant un pot de fleurs, un poème de jeunesse datant de 1859.
Minuit au vieux beffroi : l’ombre dort, et la lune
Se joue en l’aile noire et morne dont la nuit,
Sombre corbeau, nous voile. Au ciel l’étoile fuit.
– Mille voix du plaisir voltigent à moi : l’une
M’apporte ris, baisers, chants de délire : suit
Une fanfare où Strauss fait tournoyer la brune
Au pied leste, au sein nu, que sa jupe importune.
– Tes masques ! carnaval ! tes grelots ! joyeux bruit ! –
Et moi, je dors d’un œil, et je vous dis, Marie,
Qu’en son vase embaumé votre fleur est ravie
D’éclore sous vos mains et tressaille au bonheur
De vivre et se faner un soir sur votre cœur !
– Ah ! d’une aurore au soir dût s’envoler ma vie
Comme un rêve, fleurette, oui, ton sort, je l’envie !
Citations musicales :
Minuit au vieux beffroi : Le Diable dans le beffroi est un opéra inachevé de DEBUSSY, d’après le conte d’Edgar Allan POE.
Sombre corbeau : Restons avec Poe (dont on se souvient qu’il a été traduit en français par Mallarmé). Le chef d’orchestre américain Léonard SLATKIN a mis en musique le poème the Raven (le Corbeau).
Strauss : Concert du Nouvel An à Vienne 1981 : Aus der Ferne Polka Mazur, Op. 270.
Tes masques ! carnaval ! Restons à Vienne avec Robert SCHUMANN et son Carnaval de Vienne.
son vase embaumé : BERLIOZ La Damnation de Faust « Voici des roses ».
se faner un soir : Restons avec Berlioz et ses Nuits d’été dans « le Spectre de la rose ».
Comme un rêve : FAURÉ Après un rêve.
excellent pot de fleur (je ne connaissais pas) et très belle mise en musiques !
ton croisement de l’oulipo et de l’oumupo est réjouissant.
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Oui j’aime bien, cet exercice mensuel d’oulimupo par affinités électives entre Érato et Euterpe.
J’avais un peu oublié ce poème de jeunesse (Mallarmuche avait 17 ans), et pourtant tout est déjà là, le diable dans le beffroi, les corbeaux et les fleurs envasées.
Bonne journée, Jérôme.
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C’est réussi. Comme quoi la valeur n’attend pas le nombre des années.
Et ce billet me plait bien, encore une fois 🙏
Bonne soirée, J-L
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Oui, je suis (re)tombé dessus un peu par hasard en reprenant les œuvres complètes de Mallarmé, et je trouve que c’est déjà un poème mallarméen (et un peu Poë-tique aussi) par les thèmes abordés, minuit au beffroi, le corbeau et les fleurs en vases. Et les correspondance en musique sont venues toutes seules !
Bonne soirée, SOlène.
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Tu as encore de quoi faire avec Mallarmé 😊
Bonne journée, Jean-Louis.
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Ah ça, si je veux les faire tous !
Bonne journée, SOlène.
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Pour une fois un poème qui semble presque compréhensible, peut-être était-il souffrant.
Je plaisante, en tous cas, belles illustrations musicales.
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Hihihi, bonne journée, John Duff.
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C’est pas faux ce que dit John. En fait, plus il prenait de l’âge et moins ses poèmes etaient compréhensibles…. Disons qu’ils se détachaient de l’intelligible à tt prix pour privilégier rytmes et sons. Musicien avant tout ton pote Mallarmé 😊
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Quand musique et poésie se rencontrent !
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Bonjour Jean-Louis, mes hauts-parleurs remarchent, aussi je me suis précipitée sur tes billets et j’aime beaucoup ce poème de Mallarmé, que je découvre pour la première fois et que je trouve très influencé par Baudelaire, et encore très romantique, avec cette imagerie de beffroi et de corbeaux.
J’ai particulièrement apprécié d’écouter Schuman et aussi Régine Crespin dans Berlioz.
Je ne connaissais pas cet opéra de Debussy et j’étais étonnée qu’il commence par « au clair de la lune », c’est curieux.
Bonne semaine à toi 🙂
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Oui, je le trouve sympa ce poème de jeunesse de Mallarmé.
Et puis, il est compréhensible !
Bonne journée, Marie-Anne.
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