Il y a quelque 2500 ans, un trio d’auteurs grecs, SOPHOCLE, EURIPIDE et ESCHYLE, fixait les grands mythes grecs et jetait les bases de la tragédie, creuset de notre culture. La force de ces archétypes est telle qu’ils inspirent toujours les auteurs, comme nous allons le voir.
Sophocle a écrit plus de cent pièces, mais seules huit d’entre elles nous sont parvenues.
Trois d’entre elles font partie de la mythologie associée à la ville de Thèbes (Antigone, Œdipe roi et Œdipe à Colone) et trois autres à la guerre de Troyes (Ajax, Électre, Philoctète).
Antigone (- 441) est certainement la pièce de Sophocle la plus connue de nos jours. Antigone est la fille d’Œdipe et de Jocaste (Jocaste étant elle-même la mère d’Œdipe se trouve donc être à la fois la mère et la grand-mère d’Antigone). Elle est aussi la sœur d’Étéocle, Polynice et Ismène. À la mort d’Œdipe, les deux frères Étéocle et Polynice se disputent le trône laissé par leur père, et meurent dans un combat fratricide. Leur oncle Créon ordonne que le corps d’Étéocle ne soit pas enseveli comme le voudrait la loi divine, ce qu’Antigone refuse. Elle se fait surprendre alors qu’elle enterre le corps de son frère, et est condamnée à être emmurée vivante. Hémon, fils de Créon et fiancé d’Antigone intervient auprès de son oncle qui se laisse fléchir et gracie Antigone, mais trop tard, Antigone s’est pendue dans la grotte où elle devait être emmurée.
Cette pièce a inspiré de très nombreux artistes, notamment COCTEAU et Anouilh au XXe siècle et a inspiré moult opéras.
Dans Œdipe roi, l’action se passe à Thèbes ravagée par la peste. Œdipe, devenu roi, cherche à savoir d’où vient la malédiction qui frappe et sa famille, et Thèbes. Il demande au devin Tirésias, qui refuse de répondre. Devant la colère d’Œdipe, il finit par lui révéler qu’il est à la fois le meurtrier de son père et l’époux de sa mère. Devant cette horrible découverte, il se crève les yeux, et demande à partir en exil, après avoir confié ses filles, Antigone et Ismène, à Créon.
Une adaptation à l’opéra de cette tragédie est Œdipus Rex, de STRAVINKY, sur un livret de Jean Cocteau.
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Le troisième volet de la trilogie thébaine est Œdipe à Colone. Après s’être crevé les yeux et avoir quitté Thèbes, Œdipe se trouve à Colone, une ville proche d’Athènes. Seules ses filles le soutiennent tandis qu’il cherche à se disculper. Créon, averti par les dieux que la victoire sera à ceux qui seront avec lui veut le ramener à Thèbes, aidé de ses fils Étéocle et Polynice. Aidé par Thésée, le roi d’Athènes, il se retire dans une cachette où il disparaît, après avoir promis sa protection à Athènes.
Le texte a inspiré plusieurs œuvres, dont un opéra d’Antonio Sacchini datant de 1786 (Œdipe à Colone), ainsi qu’une pièce chorale de Iannis Xenakis, À Colone (1977). Le compositeur roumain ENESCO (1881 – 1955) a écrit un Œdipe (1931) reprenant les deux pièces de Sophocle.
Dans Les Trachiniennes, Sophocle nous raconte la mort d’Héraclès, tué par sa femme Déjanire qui, jalouse, a enduit la tunique de Nessus (un centaure vaincu par Héraclès dans ses douze travaux) du sang de l’hydre de Lerne (un autre monstre tué par Héraclès), pour le rendre fidèle. Malheureusement, c’est en revêtant cette tunique empoisonnée que le héros trouve la mort. Déjanire se tuera quand elle comprendra son erreur.
Cette légende de Déjanire a été portée à l’opéra par Camille SAINT-SAËNS en 1898 aux arènes de Béziers. (Attention, rareté !)
La trilogie liée à la guerre de Troie commence avec Ajax (- 445). Ajax veut se venger des Atrides, mais Athéna trouble sa raison, et dans un accès de folie, il massacre du bétail. Revenu à lui, et se rendant compte du ridicule auquel il s’est soumis, il se suicide. Ulysse réussit toutefois à persuader Agamemnon de sa vaillance et lui obtient une sépulture digne.
Vient ensuite Électre (- 415). À Mycènes, Électre attend le retour de son frère Oreste. Quand elle apprend la mort de celui-ci, elle envisage de tuer elle-même Clytemnestre qui avait tué son mari Agamemnon (le père d’Électre). Quand finalement Oreste revient, elle l’exhorte à assassiner leur mère Clytemnestre et son amant Egisthe.
Parmi les nombreuses adaptations de ce drame, on peut noter l’Elektra de Richard STRAUSS.
Vient ensuite Philoctète (- 409). Philoctète est ce héros qui a allumé le bûcher d’Héraclès pour mettre fin à ses souffrances, empoisonné par la tunique de Nessus que sa femme Déjanire lui avait envoyée pour le rendre fidèle. En récompense, Hercule lui légua ses flèches magiques trempées dans le sang de l’hydre de Lerne. Mordu par un serpent, Ulysse le laissa seul sur une île. Le jeune Néoptolème, fils d’Achille, est envoyé par Ulysse pour le ramener à Troie, lui et ses précieuses flèches. Mais le jeune homme ne peut se résoudre à tromper Philoctète, et lui révèle les desseins d’Ulysse. Dès lors Philoctète veut reprendre son arc pour tuer ce dernier. Il faut une apparition d’Héraclès pour le convaincre d’aller à Troie, où il sera guéri. Dès lors, c’est avec une de ses flèches qu’il tuera Pâris, mettant ainsi fin à la guerre de Troie.
Le personnage de Philoctète apparaît dans le Déjanire (1898) de Camille SAINT-SAËNS (cf. cidsus)
Il y a encore une œuvre de Sophocle, les Limiers, dont on a retrouvé des fragments au début du XXe siècle. Le sujet traite du vol des troupeaux d’Apollon par Hermès, tout juste né. À la fin, Apollon et Hermès se réconcilient grâce à la lyre de ce dernier.
Cette pièce a inspiré Albert ROUSSEL (1869 – 1937) avec son conte lyrique La Naissance de la lyre, créé en 1925.
Cliquez sur l’enregistrement historique (1930)
(Source principale : Dictionnaire des personnages, Bouquins Laffont, 1999)
Bon jour Jean-Louis,
C’est un bel article hyper pointu… et dire que j’en suis resté entre Ésope et Plaute … 🙂
Bonne journée à toi 🙂
Max-Louis
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Merci Max-Louis.
Je viens tout juste de recevoir ton livre, je te dirai.
Bon jour à toi aussi. 🙂
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