J’aurais pu intituler ce billet « Quand l’obscurité fait place à la lumière », mais ce titre aurait été moins percutant.
Un des premiers airs qui me vient à l’esprit sur ce thème est la cantate Aus der Tiefen rufe ich zu dir (Du fond des ténèbres, je crie vers toi, Seigneur), une des premières cantates de J.S.BACH, datée de 1707.
Quelques décennies plus tard, Joseph HAYDN, dans son oratorio La Création (die Schöpfung) décrit de manière très contrastée le chaos originel duquel Dieu fait surgir la lumière.
Dans la Flûte enchantée (Zauberflöte), de MOZART, le héros doit vaincre symboliquement l’obscurité pour parvenir à la lumière de la connaissance. À la fin, la reine de la Nuit et Monostatos sont rejetés dans les ténèbres, alors que Pamina et Tamina accèdent à la lumière de la Connaissance.
Dans Fidelio de BEETHOVEN, les prisonniers célèbrent la lumière quand on les tire de l’obscurité du cachot où ils croupissent.
On trouve un effet semblable au début du dernier mouvement de la 9e symphonie de Beethoven où, après une sorte de chaos orchestral, une phrase lumineuse surgit et prend le dessus (jusqu’à devenir le thème qui sera repris par le chœur dans l’Ode à la Joie, de SCHILLER.)
Cliquez sur l’orchestre et le chœur
Dans son très théâtral Requiem, BERLIOZ crée un effet terrible dans le mouvement « Tuba mirum ». Ce mouvement correspond aux trompettes du jugement dernier, annonçant le Juge suprême qui donnera à chacun la place qu’il aura méritée suite à son séjour sur terre. Il commence donc par les fameuses trompettes, sonnant aux quatre coins de l’église, suivies d’un roulement de timbales crescendo, avant que le chœur n’exprime la lumière du rédempteur effaçant les ténèbres.
Cliquez sur le chœur annonçant la lumière surgissant du chaos et des ténèbres
Qu’il me soit permis ici de citer une anecdote vécue dans ma folle jeunesse. Je participais à une production un peu mégalo du Requiem (cf. cliché photographique cidsous, je suis dans le cercle rouge au fond), avec deux cents instrumentistes et sept cents choristes. Derrière le chœur se trouvaient HUIT paires de timbales et le nombre de cuivres qui convenait pour les accompagner, le tout jouant fortississimo. Quand le chœur a commencé à chanter pour s’extraire du chaos, je n’ai RIEN entendu. J’ai regardé autour de moi, ai vu tous ces choristes bouches grand ouvertes, mais pas le moindre son n’arrivait à percer les ténèbres. Le chef a dû se résoudre à demander aux instrumentistes de faire un fortissimo au lieu d’un fortississimo !
Et si vous avez eu le courage d’arriver jusqu’ici, vous avez le droit de cliquer sur le cadeau bonus.
Deux cents instrumentistes et sept cents choristes ! Waouhhh cela devait, malgré ton anecdote, à laquelle je ne pige rien, mais ce n’est pas grave ;), être grandiose ! C’est une cathédrale ?
J’aime lire tes articles même si parfois je suis larguée 🙂
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Je confirme, c’était grandiose !
C’était à l’église Saint-Roch, à Paris et il y avait des fanfares de cuivres aux quatre coins cardinaux de l’église, ce qui donnait aussi un effet stéréophonique (voire tétraphonique) terrifique !
Pour l’anecdote, l’explication est que d’habitude, quand on chante très fort, on s’entend chanter. Si on est 700 à chanter très fort, on entend le chœur chanter. Mais là, l’orchestre (percussions + cuivres) faisait tellement de bruit qu’on ne s’entendait absolument pas chanter !
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C’est une très belle église et l’acoustique est en général exceptionnelle dans ce genre d’endroits. Effectivement pour un choeur de 700 c’est pas terrible ! Comme quoi le choix du tempo est important !
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Quand tu as le moral dans les chaussettes, tu te mets le « Tuba mirum » à fond les manettes, et ça repart !
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Je vais tester 😉
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Bonjour J-L
Ton titre m’a fait immédiatement penser à l’expression « de la discussion jaillit la lumière ». Mais pas que, à cette célèbre citation de Nietzsche egalement: » il faut avoir encore du chaos en soi pour enfanter d’une étoile qui danse »…
Et oui, pas de lumière sans obscurité; l’heure la plus sombre n’est-elle pas celle qui précède le lever du soleil ?
Excellents ( et très beaux) choix musicaux, en tout cas. Y compris le bonus. Bon, j’avoue que pour accompagner mon petit-dejeuner, ce n’est pas forcément ce que j’aurais choisi d’écouter, de si bon matin. Mais j’ai cependant apprécié.
Aussi, MERCI à toi pour ce billet très inspiré.
Ah, juste une dernière chose: je n’ai pas compris ( peut-être pas encore bien réveillée):
« le chef a dû se résoudre à demander aux instrumentistes de faire un fortissimo au lieu d’un fortississimo » ( tu peux me faire un dessin steuplait?)… Euh, ne te plains pas, je passe sur la « production un peu mégalo du Requiem » 😊
Belle et bonne journée de samedi.
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Bonjour SOlène.
Le chef avait demandé à ses instrumentistes de faire le plus de bruit possible (notion de fortississimo). Mais les chœurs n’ont pas pu suivre au niveau décibels, alors le chef a dû demander aux instrumentistes de faire un peu moins de bruit (un « simple » fortissimo, ce qui est déjà pas mal quand tu as 8 paires de timbales à l’unisson 😉).
Beau samedi à toi aussi (sans artisans).
(P.S. pour le cadeau bonus, c’est parce que dans cette œuvre écrite par Messiaen à la demande d’André Malraux, alors ministre de la Culture, à la mémoire des morts des deux grandes guerres mondiales, le premier mouvement est inspiré de la même phrase que la cantate de Bach qui ouvre le billet, « Des profondeurs, je crie vers toi, Seigneur ».)
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Merci merci pour ces explications. Au 2e café, la lumière s’est faite ( à propos du fortissimo)… Sinon, je comprends vite, mais des fois, il faut m’esspliquer longtemps 😉 Non, mais tkt, encore une fois: j’ai apprécié.
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Ah, puis tiens, je viens de tomber sur ça
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Chuis désolé, mais je n’accède pas à la page Facebouc (sans me connecter à ce réseau asocial).
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L’Opéra de Lille devient la première maison d’Opéra française à obtenir une certification internationale ISO 20121, qui couronne les pratiques en matière environnementale et sociale de l’ensemble de ses équipes..
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Ah d’accord, merci ! 🙂
(hihi, j’étais déjà au courant 😉)
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Gnagna, ça m’apprendra à penser à toi. Jamais content Toulop’ 🤣
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Crédit photo: Velvet

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Merci pour votre article, votre anecdote m’a bien fait rire, j’espère que c’était en répétition… et cool le cadeau bonus, malheureusement mes oreilles sont peu sensibles à Messiaen, tant pis… très bon week-end
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Oui, c’était à la première répétition avec le chœur et l’orchestre.
L’équilibre a été assez vite rectifié.
Bone ouikènde, Louise.
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Ouf ! 🙂
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Le jeu de la lumière et de l’obscurité est proche de celui du son avec le silence. La lumière jailli de l’obscurité et le son du silence.
Comme le Yin et le Yang dirait Tchang à Tintin.
Belle journée Jean-Louis.
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Ton allusion à Tintin est d’autant plus intéressante que j’ai longtemps cherché le titre définitif de ce billet.
Ce n’est que ce matin en me réveillant que j’ai changé le titre « Quand du chaos jaillit la lumière » en « Et du chaos jaillira la lumière », qui sonnait mieux.
Mais dans le fond, j’avais toujours en tête cette citation de l’alboum « Le Secret de la Licorne » « De la lumière jaillira la lumière », qui sera la clé de l’énigme permettant de mettre la main sur le fameux trésor de Rackam le Rouge (et par indirection; qui permettra au capitaine Haddock d’acheter le château de Moulinsart.
Bonne soirée, Régis.
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De belles références communes…
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Ne nous voilons pas la face, ça pète.
Le rond rouge c’était pas la peine, on te voit très bien.
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Hihihi, tu t’en souviens de ces concerts à Saint-Roch ?
Bonne soirée, John Duff.
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Je suis en train d’écouter Messiaen, toujours très mystique et christique, et c’est vrai que la première partie est ténébreuse à souhait. Puis la résurrection très lumineuse.
Merci Jean-Louis pour tous ces clair-obscur ! Bonne journée 🙂
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J’aime beaucoup cette pièce de Messiaen, que j’ai eu l’occasion d’écouter, (et de voir,) interprétée par l’Orchestre de Paris dirigé par Pierre Boulez. Le spectacle de Boulez dirigeant cette partition sans baguette étant en soi déjà quelque chose d’exceptionnel!
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Je comprends. Moi aussi j’ai vu Boulez diriger « le sacre du printemps » et j’avais adoré ce concert. C’est une grande chance de pouvoir assister à ce type de spectacle.
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